Votre Oustadha Zaynab applique enfin ses propres conseils et sera en congé du 8 juillet au 31 août. Pendant cette période, je prends le temps de me reposer pour revenir avec une meilleure énergie. Seules les demandes et les mails concernant la formation "Coran de ma vie" seront traités par mon équipe. À très bientôt, insha'ALLAH.
Illustration d'un homme pouvant être luqman, de dos

Luqman, un père exemplaire

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Luqman est une figure sage dont le nom est désormais celui d’une sourate. Un honneur qu’Allah a accordé à cet homme, présenté dans le Coran comme étant un père exemplaire et prodiguant à son fils des enseignements empreints de foi et de morale. À travers le dialogue entre Luqman et son fils, c’est toute la richesse de la relation père-fils qui se révèle, mêlant affection, éducation spirituelle et valeurs éthiques.

Sommaire

Les versets qui ont motivé l’épisode

versets 17 à 19 de la sourate Luqman

Mon cher fils, célèbre la salat et ordonne ce qui est reconnu convenable et interdit ce qui est reconnu inconvenable, et sois endurant devant ce qui t’atteint, telle est la résolution à prendre en toute entreprise.
Et ne te détourne pas des êtres humains par mépris et ne marche pas sur la terre avec orgueil, car Allah n’aime pas tout présomptueux plein de gloriole. Et sois modéré dans ta démarche et tempère ta voix, car la voix la plus désagréable est celle des ânes.

Sourate Luqman – ayat 17 à 19

Le contexte

Sur Luqman, comme sur tout autre sujet, je me cantonne à ce que dit Allah ﷻ, ce qu’Il donne comme information, puis à ce que le Prophète ﷺ a transmis à ses compagnons. 

Allah ﷻ aurait pu parler d’un homme sage anonyme, mais Il a mentionné son prénom, ce n’est pas rien. Il lui a même donné le titre d’une sourate. C’est une information importante. Donc, je ne vais ni m’attarder sur son âge, son origine, ni donner d’informations précises parce que je n’ai pas de certitude par rapport à cela. En faisant tes propres recherches, tu verras que la plupart des compagnons et des hommes sages disent que c’était une personne noire qui avait été esclave puis affranchie.

Certains disent qu’il vivait en Éthiopie ou au Soudan actuel, d’autres disent qu’il venait d’Égypte. Certains disent qu’il était jeune, d’autres qu’il était très âgé. On dit qu’il était menuisier, charpentier ou forgeron. Ce qui est important de savoir, c’est que c’était un homme modeste qui vivait une vie simple, travaillant de ses mains. Il avait au moins un fils et apparemment, il est généralement accepté qu’il était noir.

Pour ce qui est de l’époque, certains disent que c’était du temps du Prophète Ibrahim عليه السلام, d’autres disent que c’était du temps de Moussa عليه السلام, ou en tout cas pas loin. Il y a différentes opinions à ce sujet. Je ne reviendrai pas sur ce genre de détail parce que je n’en ai aucune certitude bien sûr. Ce que l’on sait, c’est qu’il croyait en Allah ﷻ comme les prophètes qui ont précédé le Prophète Muhammad ﷺ. C’est l’information la plus importante.

Les termes employés par Allah ﷻ pour parler de Luqman

Voyons la caractéristique par laquelle Allah ﷻ présente Luqman عليه السلام : la hikmah. Il dit expressément : 

« Nous avons effectivement donné à Luqman la hikmah. » 

La hikmah est couramment traduite par « sagesse », ce qui en fait partie, mais dans son sens étymologique et profond, c’est encore plus précis. La hikmah, c’est : 

  • la sagesse,
  • la maîtrise, 
  • la prudence,
  • la science appliquée, 
  • un sens caché…

En essence, la hikmah englobe une science maîtrisée, un savoir maîtrisé, mais surtout un savoir appliqué et vécu. 

La hikmah, une notion centrale

Quelqu’un qui possède la hikmah sait, connaît, et l’application de ce savoir se voit dans sa vie. Il y a des personnes qui connaissent beaucoup de choses, des savants, mais tout savant n’est pas forcément sage. On peut être savant sans être sage, alors que le sage, celui qui a la hikmah, est forcément quelqu’un qui connaît et applique ce qu’il connaît.

Même si ce n’est pas une science très étendue, elle est suffisamment appliquée et les effets sont suffisamment visibles sur cette personne pour que cela soit considéré comme une grande science. Combien de personnes possèdent beaucoup de connaissances, mais celles-ci se limitent à ce qu’ils disent, à leurs connaissances intellectuelles, sans que l’on en voit les traces sur eux ? Ces personnes ne peuvent pas être considérées comme sages.

On voit donc que cette hikmah est une richesse, et qu’elle n’est pas donnée à tout le monde. C’est un but à atteindre, une aspiration pour beaucoup. Luqman avait cette hikmah, cette sagesse, cette science appliquée, visible dans sa vie.

Il est crucial de se concentrer là-dessus, car c’est la première information qu’Allah ﷻ nous donne sur Luqman عليه السلام dans le Coran. Allah ﷻ, qui l’a créé, le connaît mieux que quiconque et veut manifestement que nous retenions cette hikmah de Luqman.

Tout au long de la sourate Luqman, nous devons être attentifs à ce qu’elle nous enseigne sur la hikmah. Chaque élément de cette sourate est destiné à nous aider à comprendre plus précisément cette notion. Il est essentiel d’analyser, pour saisir ce qu’il faut faire pour : 

  • acquérir la hikmah, 
  • comprendre ce qu’elle englobe, 
  • ne pas la perdre, 
  • la propager à nos proches et au-delà.

La reconnaissance, une autre qualité de Luqman

Allah ﷻ mentionne ensuite une autre caractéristique de Luqman : la reconnaissance (ash-shukr). En effet, Allah ﷻ dit :

« Nous avons effectivement donné à Luqman la sagesse »,

et puis il continue en disant, comme si Luqman parlait :

« Sois reconnaissant envers Allah. Quiconque est reconnaissant, l’est pour lui-même. Quant à celui qui est ingrat, Allah Se dispense de tout, Il est digne de louange. »

Allah est Al-Ghani (le Riche, Celui qui Se passe de tout) et Al-Hamid (le Digne de louange). Sans entrer dans l’étymologie de chaque mot, Hamid désigne quelqu’un qui est loué en toutes circonstances, indépendamment de la présence d’un auditoire. Allah ﷻ n’a pas besoin de nous pour être loué ; Il est louable en Lui-même.

Nous ne dirons pas de quelqu’un qu’il est Hamid, car c’est un attribut spécifique d’Allah ﷻ. On peut dire de quelqu’un qu’il est Mahmoud. Le Prophète ﷺ porte le nom de Muhammad, mais seul Allah ﷻ peut être appelé Hamid, car Il est autosuffisant dans ce domaine.

Donc, Allah ﷻ dit : « Nous avons donné la sagesse à Luqman » et ensuite, on entend « Sois reconnaissant envers Allah. » C’est la première phrase que l’on entend de Luqman. À ce moment-là, il n’a pas d’auditoire. Allah ﷻ n’a pas encore introduit son fils ou quelqu’un d’autre. C’est comme s’Il mettait en lumière que Luqman se parlait à lui-même, illustrant qu’il vivait sa vie sous cette règle : la reconnaissance envers Allah.

Luqman cherchait systématiquement des raisons d’être reconnaissant envers Allah à chaque étape de sa vie, du matin au soir, dans toutes ses actions.

La différence entre shukr et hamd

En fait, c’est comme s’il disait qu’il faut simplement être reconnaissant, car shukr est différent de hamd

On peut dire que Shukr, c’est la reconnaissance : c’est simplement reconnaître le bienfait qui est devant toi. 

Hamd, c’est différent ; c’est à la fois reconnaître le bienfait et louer la personne.

Appliquée aux humains

Par exemple, si quelqu’un que tu connais ou ne connais pas te tient la porte, tu es reconnaissant envers cette personne et tu dis « merci ». Ça, c’est de la reconnaissance : je reconnais ce que tu viens de faire. Mais est-ce que je vais louer cette personne en disant qu’elle est formidable ou en chantant ses louanges ? Pas nécessairement. Je ne vais pas définir cette personne uniquement par ce geste.

Pour cela, il faut que tu connaisses la personne, que tu passes du temps avec elle, et qu’elle ait fait preuve de plusieurs actes consécutifs qui te rendent reconnaissant envers elle. Tu vas apprendre à connaître la personne à travers ses actions, ses bonnes actions, et là, tu pourras faire son éloge.

Appliqué à Allah ﷻ

Attribuer cela à Allah ﷻ, à qui l’on dit hamd, est différent. Le premier mot de la sourate Al-Fatiha dans le Coran est « Al-hamdulillah », ce qui nous enseigne que toute notre vie doit être guidée par la reconnaissance envers Allah ﷻ et par le fait de savoir Le louer. Ainsi, il faut être reconnaissant et Le louer, vraiment chanter Ses louanges. 

Le fait qu’Allah ﷻ utilise parfois hamd et parfois shukr quand Il parle de reconnaissance montre que le shukr est plus facile à appliquer que le hamd. 

Quant à Allah ﷻ, en parlant de shukr, c’est-à-dire de reconnaissance, il nous enseigne une grande leçon.

Les affirmations positives de Luqman

Allah ﷻ dit : « Sois reconnaissant. » C’est là que l’enseignement se trouve, à travers Luqman. Il nous enseigne cela à travers une phrase qu’il se dit à lui-même. C’est comme s’il se répétait tous les jours :

« Sois reconnaissant, sois reconnaissant, sois reconnaissant. »

On a l’impression que c’est une phrase qu’il se répète, comme les affirmations positives que l’on entend dans le développement personnel. Ces choses qu’on se dit le matin devant le miroir : « Tu es grand, tu es beau, tu es fort, etc. »

 Luqman عليه السلام nous enseigne qu’au lieu de dire cela – même si ce ne sont pas de mauvaises paroles – le plus important est d’être reconnaissant. Répète-toi tous les matins, au fil de la journée, et tous les soirs : 

« Je dois être reconnaissant(e),

je dois être reconnaissant(e),

je dois être reconnaissant(e). »

On a l’impression de voir quelqu’un qui se parle à lui-même, se donnant des affirmations positives quotidiennement, et Allah ﷻ l’a capturé. C’est magnifique. Allah ﷻ nous montre un homme qui se rappelle à lui-même d’être reconnaissant. Cela enseigne beaucoup de choses, notamment le fait que l’être humain doit faire preuve : 

  • d’humilité, 
  • d’auto-discipline,
  • de capacité à se corriger régulièrement. 

Les leçons que nous pouvons en tirer 

Trouve une raison d’être reconnaissant dans tout ce que tu vois devant toi.

➡️ Tu as mangé ? Sois reconnaissant. 

➡️ Tu n’as pas à manger aujourd’hui ? Sois reconnaissant pour la nourriture que tu avais hier.

Je m’adresse surtout aux mamans avec ces exemples, car nous avons une charge mentale importante et pouvons être vite débordées. Parfois, avec plein d’enfants dans la maison, voir le désordre peut être démoralisant. On passe notre temps à ranger et, même en fin de journée, on peut se sentir dépassée. C’est facile de commencer à ramasser et ranger tout en râlant ou se plaignant en disant que la maison est toujours en bazar. Mais on pourrait être reconnaissantes. Mais reconnaissantes d’un désordre ? 

La reconnaissance dans notre quotidien

Ce désordre causé par des enfants signifie qu’il y a des enfants dans cette maison, des enfants vivants et en bonne santé, ce qui est une bénédiction que d’autres n’ont pas.

De même, si tu dois faire la vaisselle accumulée et que le lave-vaisselle ne marche pas, ou que tu n’en as pas, ou même s’il est rempli et que tu dois faire plusieurs tournées, tu pourrais penser : « Il y a trop de vaisselle. » Mais beaucoup de vaisselle signifie quoi ? Tu pourrais être reconnaissante pour la vaisselle, car cela signifie que tu as des ustensiles, ce qui est déjà une richesse

Cela signifie que tu as préparé ou que quelqu’un a préparé à manger, et que des gens se sont nourris, créant cette vaisselle. Donc, s’il y a de la vaisselle, cela signifie qu’il y a eu de la nourriture et des gens qui ont mangé. C’est un motif de reconnaissance.

Adopter cette attitude de gratitude, même dans les tâches quotidiennes, peut transformer notre perspective et nous rapprocher de l’état de shukr que Luqman عليه السلام donne en exemple.

Identifier ses plaintes pour être reconnaissantes

En fait, c’est simple : à chaque fois qu’on a envie de se plaindre, pensons à la raison pour laquelle on se plaint. C’est de devoir faire cette chose, mais pourquoi doit-on la faire ?

Par exemple, si j’ai beaucoup de linge à laver, cela signifie que j’ai des habits à mettre et encore une fois, qu’il y a des gens dans cette maison. Je ne suis pas seule. En fait, pour tout, il n’y a pas une seule chose dans notre vie pour laquelle on ne peut pas être reconnaissante, c’est impossible.

Non seulement il y a les choses visibles, mais il y a encore plus de choses invisibles, des choses auxquelles on ne pense même pas. Nous avançons souvent sans réaliser l’énormité des raisons pour lesquelles nous devrions être reconnaissants. 

En tant qu’êtres humains, nous sommes comme de grands sacs remplis de raisons d’être reconnaissants qui marchent sur Terre. Nous sommes comme des gros paquets de preuves de reconnaissance qui se déplacent sans même s’en rendre compte.

famille partageant un repas

Une reconnaissance insuffisante par nature

Même si nous passions notre temps à remercier Allah ﷻ pour tout ce qu’Il nous a donné, cela ne suffirait pas. En effet, si nous avions pleinement conscience de tout ce pour quoi nous devrions être reconnaissants envers Allah ﷻ, nous ne ferions que ça. Nous n’aurions même pas une seconde pour faire autre chose !

Ainsi, lorsque Luqman عليه السلام nous parle de cette action simple de reconnaissance, il n’a pas dit « أَنِحْمَدِ الله  » mais « أَنِ ٱشْكُرْ لِلَّهِ ». Sois reconnaissant, juste reconnais. 

➡️ Tu as mangé ? Reconnais.

➡️ Tu as de la vaisselle à faire ? Reconnais

➡️ Tu as un travail ? Reconnais

Il s’agit simplement de reconnaître un bien. C’est très facile. Cela est un bien, cela est un mal… Et ainsi reconnaître chaque bienfait.

Le lien étroit entre louange, reconnaissance…et amour

La reconnaissance est tout le temps dirigée vers le même : Allah ﷻ. Ainsi, qu’est-ce qui commence à s’installer ? Al hamd. Donc la reconnaissance, puis l’éloge, la louange. Tout mène à Lui, donc tu ne peux pas ne pas louer Allah ﷻ. 

Celui qu’on loue, on l’aime également. Donc, en Luqman, on voit un exemple de qawwâm qui se dessine. En effet, un qawwâm est aussi quelqu’un qui est reconnaissant, quelqu’un qui prend ses responsabilités. Quand on est reconnaissant, on n’a pas le temps de faire autre chose que du bien. On n’a pas le temps, tout simplement. Pense toujours à cela : si tu savais à quel point tu devrais être reconnaissant, tu ne perdrais pas de temps à faire autre chose que cela. 

Et d’ailleurs, Allah ﷻ le dit : si vous êtes reconnaissants, c’est pour vous-mêmes ; à contrario, celui qui ne l’est pas, c’est pour lui-même. Quand on regarde quelqu’un qui est reconnaissant et quelqu’un qui ne l’est pas pour deux choses similaires, celui qui est reconnaissant semble plus heureux, il semble libre. Celui qui n’est pas reconnaissant, il est en train de transporter son amertume, mais c’est lourd, c’est un sac lourd à porter quand même. Donc finalement, il est plus à plaindre qu’autre chose.

Luqman, un père exemplaire

Les Anglais aiment bien dire « lead by example« , donc “guidé par l’exemple”. On parle ici de : 

  • leadership, 
  • des enfants,
  • du fait que les gens te suivent parce que tu donnes l’exemple. 

Sans encore connaître les enfants de Luqman, on sait qu’ils ont un bon père parce qu’il vit dans la reconnaissance. Il se répète constamment, tous les jours, tout le temps : “shukr, shukr, shukr” donc « reconnaître, reconnaître, reconnaître ».

Tout ce qu’il a devant lui, il en reconnaît le bienfait. Il n’est donc pas étonnant qu’il ait acquis la hikmah (la sagesse). En effet, pour pouvoir faire preuve de hikmah, il faut aussi être reconnaissant. Ainsi, par mimétisme, on sait que son fils a un bon exemple, un bon modèle à suivre. 

Des nobles qualités

Il s’agit d’une discussion simple, un père qui parle à son fils. D’ailleurs, on n’entend pas le fils parler. 

Allah ﷻ a introduit cela en disant : 

Lorsque Luqman dit à son fils, tout en l’exhortant 

وَإِذْ قَالَ لُقْمَٰنُ لِٱبْنِهِۦ وَهُوَ يَعِظُهُ

Wa’idh qala Luqmanu li’ibnihi wa huwa ya’idhuhu.

Allah ﷻ précise que Luqman l’exhorte. En effet, il discute et à un moment donné, il amène le sujet qu’il veut aborder. 

Ensuite, quand il dit « ô mon cher fils », à chaque fois qu’il parle à son fils, « ô mon cher fils », « ya bunayya », « ya bunayya », « ya bunayya ». Donc il prend le temps de répéter cela. Et celui qui dit « ô mon cher fils » a choisi le moment pour s’adresser à lui. Il n’a pas parlé pendant un moment où il était en colère, triste, fâché, ou fatigué. Tous les codes de la nassiha sont respectés, ainsi que les codes de la communication donnés par notre Coran

Tout ce dont nous avons parlé sur la parentalité, sur un homme qawwâm, sur la relation avec Allah, le commerce avec Allah, la reconnaissance, le hamd, Luqman a tout pris, il a tout combiné et nous avons tout cela concentré ici. 

Si tu prends le temps de chercher chacune de ses caractéristiques, tu les trouveras.

Une discussion qu’Allah ﷻ a voulu partager avec toi

On sait qu’Allah ﷻ observe tout et voit tout. Lui qui observe tout, a capturé ce moment dans la vie de cet homme simple que peut-être personne ne connaissait. Puis, Il l’a immortalisé dans Sa Parole. 

Il y a eu beaucoup de discussions entre parents et enfants depuis la nuit des temps à travers toute l’humanité, depuis la création d’Adam jusqu’à notre époque actuelle. Mais c’est cette discussion entre ce père ordinaire qu’Allah ﷻ a choisi de partager avec toi, avec moi, avec nous. Je ne sais pas si tu réalises cela. Allah ﷻ te fait littéralement entrer chez cet homme dans son foyer, avec sa famille, pour écouter cette discussion. Personne n’aurait eu connaissance de cette conversation si Allah ﷻ ne nous l’avait pas racontée. As-tu déjà réfléchi à cela en lisant cette histoire ? 

Sans le récit d’Allah ﷻ, nous n’aurions jamais su ce qui s’était passé. Peut-être même que d’autres membres de sa famille, vivant sous le même toit, n’étaient pas au courant de cette discussion. Peut-être que la femme de Luqman, la mère de ce fils, était dans la pièce à côté et n’était même pas au courant de ce qui se disait. 

Certains savants disent qu’il était menuisier, ou du moins un artisan, et que c’était pendant qu’il travaillait son métier qu’il parlait à son fils. D’autres disent que c’était au cours d’une promenade. Quoi qu’il en soit, peu importe où cela s’est passé, il a pris le temps de passer un moment de qualité avec son fils, dans une activité qui favorisait l’écoute de son fils.

En tout cas, c’est incroyable que nous, au moment où je revisite cet épisode, chacun est chez soi en train d’ouvrir son Coran et de lire. Et parce qu’Allah ﷻ lui a donné de l’importance, par ricochet, nous lui donnons de l’importance également, et nous essayons d’en tirer les leçons qui nous sont enseignées.

L’honneur fait par Allah ﷻ à Luqman

Il y a des prophètes dont l’histoire a été racontée dans le Coran, mais qui ne sont pas nommés. Allah ﷻ dit même qu’il y a des récits de certains prophètes dont nous n’avons pas été informés. 

C’est le cas de Talut et Jalut. Talut était un roi qui a combattu Jalut (Goliath). Daoud (David) était dans l’armée de Talut et a vaincu Jalut (Goliath). À cette époque, il y avait un prophète.

Avant que le roi Talut soit nommé, il a été annoncé par un prophète dont le nom n’est pas mentionné, mais qui parlait de manière notable. Allah ﷻ mentionne ce prophète en disant : 

« Leur prophète leur a dit… » 

Nous ne connaissons pas le nom de ce prophète. Il y a des récits où certains noms de prophètes comme Samuel, Saül et d’autres sont mentionnés, mais il y a aussi des récits où les noms ne sont pas précisés, bien que l’histoire soit attribuée à eux. Pourtant, ces personnes sont très importantes, et une partie de leur histoire est racontée dans le Coran sans mention de leur nom. 

Abu Bakr est une figure mentionnée dans le Coran, mais son nom n’est pas cité quand il est dit “ces deux” qui étaient dans la grotte. Le Prophète ﷺ a dit : 

« Ne t’attriste pas, Allah est avec nous »

Nous savons qu’il parle d’Abu Bakr bien que son nom ne soit pas mentionné. 

Cela met encore plus en lumière l’honneur qu’Allah ﷻ a voulu accorder à cet homme lambda, Luqman, qui était peut-être un ancien esclave comme mentionné dans certaines histoires, peut-être un simple forgeron ou un père de famille paisible dans son coin.

Allah ﷻ le mentionne ici par son nom, le répétant plusieurs fois, capturant un événement de sa vie, peut-être un moment fréquent avec son fils, et lui attribuant le titre d’une sourate. Si nous ne comprenons pas ici qu’il est nécessaire de nous arrêter, de faire une pause, d’écouter ce que la sagesse et les enseignements ont à nous dire avant de poursuivre notre chemin, alors il y a un problème. 

Coran ouvert devant une source de lumière

Ne jamais négliger des moments simples avec ses enfants

Lorsque j’analyse tout cela, je me dis que Luqman fait partie des personnalités que j’aimerais rencontrer au Paradis, insha’Allah. 

J’ai vraiment envie de rencontrer cet homme, car Allah ﷻ l’a aimé pour le mentionner ainsi. C’est un homme qui a vécu simplement, qui n’était peut-être pas populaire à son époque, et il ne l’était certainement pas jusqu’à ce que le Coran parle de lui.  

Allah ﷻ parle de lui, et je me dis qu’il est mort sans savoir que sa discussion avec son fils serait récitée, psalmodiée, apprise, transmise et méditée par des milliards d’êtres humains sur Terre. Franchement, juste cela, c’est une leçon divine qu’Allah ﷻ nous enseigne : il ne faut jamais négliger une occasion de passer du temps avec son enfant. Le fait qu’Allah ﷻ ait capturé et immortalisé cette discussion parfaite montre qu’il ne faut pas négliger ces moments, qu’il ne faut pas négliger ces occasions de : 

  • passer du temps avec son enfant, 
  • discuter avec lui, 
  • lui parler de la meilleure manière possible.

Regarde comment Luqman parle à son fils, avec bienveillance. Quand quelqu’un dit « mon cher fils », on a envie d’écouter. On voit qu’il y a une relation saine entre le père et le fils ici. Cela me fait penser à Yusuf et Ya’qub. Regarde leurs échanges, comment ils interagissent. On n’a même pas besoin que le Coran nous dise explicitement que Ya’qub aimait énormément son fils Yusuf, ou que Yusuf aimait énormément son père Ya’qub.

Il n’a même pas besoin de parler de ça. D’ailleurs, pour les prophètes, Allah ﷻ ne mentionne même pas ce genre de détails, tellement l’amour transpire dans leurs paroles, tellement la bienveillance et le respect sont évidents. Donc il n’est même pas nécessaire de le répéter. 

Ne négligez pas l’occasion d’offrir une bonne éducation à votre enfant, de valoriser votre enfant, de le guider vers son avenir, et de lui rappeler qu’Allah ﷻ est tout ce qu’il a. 

Finalement, Luqman parle aussi de sa relation avec son fils, et du respect que son fils lui doit. Allah ﷻ a capturé tout cela dans les trois premières lignes qui décrivent Luqman. 

Le shirk, le contraire de la reconnaissance

Cette discussion est si pertinente, si belle, parce que Allah ﷻ y participe aussi. Il intervient dans cette discussion à travers les paroles de Luqman, dès le début où il commence en disant à son fils :

« Ne donne pas d’associé à Allah ».

C’est un beau parallèle avec ce qu’il disait précédemment, car Luqman se parlait à lui-même de reconnaissance envers Allah ﷻ. Maintenant, il lui dit de ne pas commettre le shirk, c’est-à-dire d’associer quelqu’un à Allah ﷻ. 

Ainsi, le shirk est présenté comme l’opposé de la reconnaissance. Dans cette discussion si pertinente, Allah ﷻ intervient également directement à travers les paroles de Luqman, car il mentionne :

« Et Nous avons enjoint à l’homme [la bienfaisance envers] ses parents. »

Allah ﷻ parle ici des deux parents, et spécifiquement de la mère, en évoquant comment elle a porté l’enfant, avec peine sur peine, jusqu’à l’allaitement complet, sur une durée de deux ans. 

Allah ﷻ nous fait ce rappel à travers les paroles de Luqman. Après cela, Luqman reprend son discours, en rappelant les étapes par lesquelles nos mères sont passées pour nous mettre au monde, de la grossesse à l’allaitement complet, en nous ordonnant de reconnaître Allah ﷻ. En effet, c’est à Lui que nous appartenons même si c’est de nos parents que nous venons biologiquement. En fin de compte, nous retournerons tous, nous et nos parents, vers Allah ﷻ le point de départ initial.

Dès lors qu’on manque de reconnaissance, tout peut basculer. Le manque de reconnaissance ouvre la porte :

  • au shirk, 
  • à la tristesse, 
  • aux plaintes, 
  • à l’absence de sagesse, 
  • à la précipitation, 
  • aux conflits, 
  • à l’orgueil, 
  • à une démarche qui n’est pas tempérée, 
  • à une voix qui n’est pas tempérée non plus. 

Tout ceci a un impact significatif.

La reconnaissance envers Allah ﷻ, liée à celle envers les parents

Même quand Allah ﷻ parle des parents, Il revient encore à la reconnaissance. Le fait qu’il intervienne pour parler des parents après que Luqman ait commencé par parler de la reconnaissance envers Allah ﷻ, c’est magnifique. Allah ﷻ mentionne la reconnaissance envers les parents en rappelant aussi à la fin que tout retourne à Lui. Tout est imbriqué de manière subtile pour nous enseigner que l’un des moyens de pratiquer la reconnaissance envers Allah ﷻ est de commencer par reconnaître et respecter tes parents et ta famille, ceux qui sont devant toi.

Comme le Prophète ﷺ le dit : 

لا يشكر الله من لا يشكر الناس

« Celui qui n’est pas reconnaissant envers les gens, n’est pas reconnaissant envers Allah. » 

Pourquoi ? Parce que c’est Allah ﷻ qui a envoyé ces personnes dans ta vie. Allah ﷻ ne t’envoie pas directement Ses bienfaits du ciel ; ils passent par les mains des êtres humains. Si tu ne reconnais pas ces personnes, tu ne montres pas de reconnaissance envers Allah ﷻ. 

Qu’Allah ﷻ nous préserve de penser, dire ou agir de manière inconsciente qui pourrait nier Ses bienfaits.

C’est vraiment beau car s’entraîner à être reconnaissant envers Allah ﷻ passe indéniablement par être reconnaissant envers les gens autour de nous, en particulier nos parents. Allah ﷻ a parfaitement inséré cette leçon au milieu des paroles de Luqman (عليه السلام). Ici, Allah a pris soin de mentionner cela Lui-même, ce qui ajoute un poids incontestable. Après tout ce que Luqman a dit jusqu’à présent avec tant de sagesse et de connaissances appliquées, il n’y a aucun doute sur la véracité de ses paroles. Mais lorsque Allah ﷻ prend la parole pour souligner quelque chose à la place de quelqu’un d’autre, cela devient indiscutable. C’est Allah ﷻ qui rapporte, récite et explique ce qu’Il a observé de la scène entre Luqman et son fils.

Finalement, tout ce que l’on entend du récit de Luqman, aucun récit ne pourrait le raconter mieux que cette discussion rapportée, dans le Coran, par Allah ﷻ. Il nous a donné ici l’essentiel. Nous n’avons pas besoin de connaître les détails :

  • le moment exact,
  • où cela s’est passé,
  • l’heure de la conversation,
  • l’endroit où ils étaient, etc.

Avec Allah ﷻ, nous avons exactement ce dont nous avons besoin, l’essentiel, et cela n’a pas de prix.

Enseigner la gratitude aux enfants, à la lumière du Coran

Ce que nous apprenons vraiment ici, c’est que la base de notre relation avec Allah ﷻ est la gratitude. Sans gratitude, c’est le shirk qui prend place, c’est-à-dire associer quelque chose d’autre à Allah ﷻ. Cela peut être :

  • nos désirs,
  • l’approbation des autres,
  • l’argent,
  • la célébrité…

En laissant le shirk s’installer, au lieu de cultiver la gratitude, nous enseignons à nos enfants la perdition. Enseigner la gratitude à nos enfants, comme le fait Luqman, passe nécessairement par les responsabiliser dans l’acquisition des choses pour lesquelles ils doivent être reconnaissants.

En les responsabilisant

C’est simple. Si je ne responsabilise pas mon enfant, comment puis-je lui enseigner la gratitude pour :

  • la nourriture qu’il mange, 
  • la maison dans laquelle il vit, 
  • les jouets qu’il a, 
  • les sorties qu’il peut faire, 
  • les vêtements qu’il porte…

 Cela signifie qu’il doit participer à la vie de la maison, aux tâches ménagères. En l’impliquant, je le responsabilise et je cultive la gratitude en lui. Il voit comment les choses sont créées, comment elles fonctionnent, le processus derrière chaque résultat. Il ne se contente pas d’avoir le jouet, la nourriture, les vêtements à la fin de la chaîne. Je lui explique d’où ils viennent. C’est pourquoi il est essentiel de l’impliquer activement.

Aussi, il est important de responsabiliser votre enfant en lui apprenant à donner ses jouets non utilisés à des enfants dans le besoin. Cela lui permettra d’apprécier davantage les jouets qu’il possède encore après avoir partagé ceux dont il n’avait plus besoin. 

En les encourageant

Cela peut également inclure le fait de l’encourager à travailler lorsqu’il est en âge de gagner son propre argent, tout en étant encore à la charge de ses parents à la maison. Encouragez-le à aider son père, lorsqu’il sera un peu plus grand, en contribuant financièrement au foyer. 

Comment puis-je élever un qawwam qui sera responsable de son propre foyer, qui aura ses propres responsabilités, s’il n’a jamais payé une partie du loyer à la maison ? C’est impossible.

En leur apprenant

Je peux aussi lui enseigner la reconnaissance à travers des apprentissages. Par exemple, en lui apprenant à recoudre ses propres vêtements, ce que même le Prophète Muhammad ﷺ faisait. Si l’on regarde attentivement son comportement à la maison, il montre quelqu’un de responsable, qui se prend en charge. Ainsi, entre autres raisons, il était toujours reconnaissant.

Un autre exemple serait d’apprendre à son fils ou à sa fille à préparer un repas en participant au processus, comme faire les courses, etc. En participant à ces activités, la personne se responsabilise et devient reconnaissante. Chaque fois qu’elle voit de la nourriture sur la table, elle ressentira de la gratitude parce qu’elle connaît tout le processus, depuis l’achat des ingrédients jusqu’à la préparation du plat cuisiné sur la table.

Des enseignements indispensables

Si je n’enseigne pas à mon enfant à être reconnaissant, je le pousse à chercher à combler ce vide dans son cœur laissé par le manque de reconnaissance. Puis, ce vide sera comblé par d’autres choses, comme le shirk.

Le shirk ne se limite pas seulement à l’idolâtrie, mais peut aussi inclure l’obsession pour l’argent, l’attente constante de la validation des autres, et ainsi de suite. Comme on dit, « l’argent n’est pas un bon maître », car lorsque l’argent remplit le cœur d’un enfant devenu adulte, cela peut conduire à des déceptions profondes. Si quelqu’un adore une autre personne au lieu d’adorer Allah , c’est un problème.

Ainsi, la reconnaissance envers les parents dépend également de la reconnaissance envers Allah ﷻ. En enseignant à notre enfant la gratitude pour les bénédictions que nous recevons d’Allah ﷻ, nous serons les premiers à en bénéficier, car c’est nous, en tant que parents, qui sommes responsables de l’éducation de nos enfants. Soit nous en goûtons les fruits en termes de gratitude de leur part, soit nous en subissons les conséquences si nous ne leur inculquons pas ces valeurs. 

Nous devons comprendre que les conséquences de nos actions se refléteront sur nous-mêmes en tant que parents, car cela ne touche pas directement Allah ﷻ, mais plutôt notre propre relation avec Lui.

Les 10 leçons que Luqman donne à son fils 

Il peut y en avoir plusieurs qui sont interconnectées, mais globalement, il y en a dix principales. 

  1. La reconnaissance
  2. L’unicité d’Allah ﷻ, le Tawhid. C’est le fait de ne rien associer à Allah ﷻ. 
  3. La bienfaisance envers les parents. 
  4. La prière (As-salat)
  5. Le bon conseil (An-nassiha), 
  6. La patience constante (Sabr),
  7. L’humanité
  8. L’humilité
  9. La bonne allure, dans la marche, 
  10. Le bon ton, dans la manière de parler. 

Si l’on examine ces qualités que je viens de mentionner, elles représentent toutes les qualités d’un bon leader. Un leader respecté qui : 

  • est humble, 
  • donne de bons conseils, 
  • marche correctement, a une allure appropriée, 
  • parle avec un ton modéré et clair, sans élever la voix,
  • fait preuve de patience et d’humanité, 
  • a une connexion à Allah ﷻ,
  • est reconnaissant. 

En fait, toutes ces qualités contribuent à définir un bon leader, et Luqman satisfait à toutes ces exigences, c’est certain.

Le conseil de Luqman sur la marche à adopter

Luqman conseille à son fils de ne pas mépriser les autres et de ne pas marcher avec arrogance sur la terre. 

وَلَا تَمْشِ فِى ٱلْأَرْضِ مَرَحًا

“et ne foule pas la terre avec arrogance”

Allah ﷻ n’apprécie pas l’arrogance chez les gens, parfois traduite par insolence ou impudence. 

Maraha – م ر ح , c’est le fait :

  • de ne pas maîtriser son excès de gaieté, 
  • d’être orgueilleux, 
  • d’être effronté, 
  • d’être insolent,

La différence entre humilité et modestie

Luqman évoque l’importance de l’humilité, d’être modéré dans ses actions et de tempérer sa voix. Ce sont des pépites qu’il partage avec nous ici. Il parle également de l’humilité dans sa juste mesure.

On ne doit pas s’humilier devant l’être humain en voulant être humble. Ce privilège appartient à Allah ﷻ, car c’est Lui qui nous place véritablement en position basse. C’est devant Allah ﷻ que nous devons être humbles. En présence des êtres humains, nous devons être modestes mais sincères. 

L’humilité est une marque de respect envers les personnes éminentes. À ce sujet, je te renvoie à l’histoire de Yusuf, en particulier à l’épisode où il est en prison et interprète le rêve du roi. Il choisit de rester en prison jusqu’à ce que son innocence soit prouvée. Le calme et la hikmah dont il fait preuve en proposant un plan pour gérer la famine ! Yusuf sauve tout un pays alors qu’il est encore en prison. Ensuite, lorsqu’il prend la charge de la gestion financière, il le fait avec discernement pour le bien de tous. Yusuf illustre parfaitement comment concilier humilité et responsabilité. C’est ainsi qu’il cultive la reconnaissance envers Allah ﷻ et démontre ce qu’est la sagesse. Tout est interconnecté : la sagesse va de pair avec la reconnaissance, la reconnaissance avec l’humilité, et ainsi de suite.

Progresser vers ses objectifs

 Lorsque Luqman dit :

وَٱقْصِدْ فِى مَشْيِكَ

Sois modéré dans ta démarche. 

Les savants le traduisent également par le fait de ne marcher ni trop vite ni trop lentement, dans un sens global. 

La racine  ق ص د  employée ici signifie : 

  • tendre vers quelque chose, 
  • aspirer à quelque chose, 
  • agir de manière juste, 
  • se rapprocher de son objectif sans dévier, 
  • une avancée qui ne traîne pas en longueur, 
  • une progression où le chemin vers l’arrivée est déjà facilité dès le début. L’arrivée est proche et perceptible, 
  • s’économiser (son énergie, sa salive, son temps) etc. 

En résumé, une démarche ne se limite pas à marcher d’un point A à un point B. Cela s’applique à tout ce que tu entreprends dans la vie : chaque projet, chaque voyage, chaque examen, chaque entreprise doit être mené de manière équilibrée, de A à B.

Donc, que ce soit physiquement ou métaphoriquement, tu avances de ton point A à ton point B. Dans la vie, nous avons souvent de grands objectifs, ce qui est normal. Mais en parlant d’une progression modérée – ni trop rapide, ni trop lente, vers un objectif proche – cela rend chaque étape plus facile à franchir, facilitant ainsi l’atteinte des objectifs. 

L’enseignement de Luqman nous rappelle cette sagesse lorsqu’il dit à son fils de marcher doucement et avec modération. Cette approche permet de découper un gros objectif en petites étapes réalisables. Ainsi, sans s’en rendre compte, on atteint l’objectif final sans s’épuiser. Cela évite l’épuisement à la fin du parcours. 

C’est là que l’enseignement de Luqman entre en jeu. Juste avec ce mot : « وَٱقْصِدْ – Sois modéré dans ta démarche ». Ce simple conseil nous enseigne une grande leçon sur la manière de découper nos actions. 

Quand le Coran nous éclaire sur des concepts modernes

Les objectifs SMART

On retrouve ces conseils dans des concepts modernes comme les objectifs SMART. Cela signifie qu’ils doivent être :

  • Spécifiques,
  • Mesurables,
  • Atteignables,
  • Réalistes
  • Temporellement définis.

C’est important de respecter ces critères pour atteindre un objectif. Ici, toutes ces règles SMART sont respectées et enseignées par Luqman à travers ses paroles. Nous n’avons pas besoin d’attendre la modernité pour connaître ces concepts. Même les compagnons du Prophète ﷺ, lorsqu’ils recevaient ces enseignements, comprenaient déjà ces principes fondamentaux.

Les compagnons avaient déjà compris qu’il était nécessaire de découper les objectifs en petits éléments atteignables et faciles à réaliser. 

C’est ce que font également les athlètes et les grands sportifs : avancer étape par étape. Regarder la montagne en entier peut sembler insurmontable.

Le lèche-vitrine

Ainsi, chaque action doit être dirigée vers un but clair. Lorsque Luqman a dit de ne pas marcher sur terre avec arrogance, cela inclut aussi l’idée qu’une personne arrogante n’a pas de but clair. Sa vie devient instable et chaotique. Personnellement, quand je lis ce genre de verset, je pense que nous devons cesser de « faire du lèche-vitrine » dans notre propre vie. Les gens disent souvent qu’ils vont faire du lèche-vitrine, simplement pour regarder les vitrines des magasins sans intention d’acheter quelque chose ou de conseiller quelqu’un qui souhaite acheter.

En gros, ta propre vie est de l’autre côté de la vitrine, et tu la regardes comme si tu étais un spectateur. Il ne faut pas être un simple figurant dans sa propre vie. 

Celui qui avance sur terre sans objectif clair risque de dévier, de perdre du temps, et cela peut mener à l’arrogance. C’est aussi simple que cela. Ce que Luqman enseigne à son fils avec ses mots  » وَٱقْصِدْ فِى مَشْيِكَ « , c’est de rester modéré, tempéré, et de viser des objectifs clairs. C’est comme s’il disait : 

« Mon cher fils, avance étape par étape, avec mesure, une chose après l’autre. Tu dois avoir des objectifs atteignables et tu dois avancer vers eux. »

C’est une leçon très importante. L’utilisation de la marche par Luqman à travers ses paroles, est une métaphore puissante qui nous dit qu’il faut toujours être en mouvement.

Se focaliser sur tes objectifs

Un objectif précis

Rien ne viendra à toi sans effort. Tu ne resteras pas ici assis et attendre que les choses viennent à toi. Même si cet objectif est découpé en petits objectifs faciles, aussi faciles soient-ils, tu dois marcher vers eux. Sinon, cela ne fonctionnera pas. Et ne dévie pas de ton chemin. Si tu as un objectif clair, tu ne te laisseras pas distraire. 

En fait, un objectif clair rendra toutes les distractions insignifiantes dans ta vie, te permettant de rester concentré. Lorsque tu as un objectif précis, tu sais où tu veux aller et ce que tu veux accomplir. Si quelqu’un se met sur ton chemin, tu diras « Non, je n’ai pas le temps, j’ai quelque chose d’important à faire ».

Dans ces moments-là, si quelqu’un te propose d’aller faire du shopping, tu diras « Non ». Rien ne te fera dévier de ton objectif. Personne ne pourra te faire changer d’avis. 

Limiter les distractions

Pense à quelqu’un qui passe un examen, qui rédige une thèse, qui prépare une commande, qui organise un voyage, ou qui attend la naissance imminente d’un enfant. L’objectif est clair. Rien ne te fera dévier si ton objectif est clair. Ainsi, il sera très facile de limiter les distractions.

De la même manière, tu peux te rendre compte que si tu es souvent distrait par quelque chose, peut-être que ton objectif n’est pas assez clair dans ta tête. Autrement, ces distractions n’auraient pas d’impact. 

Je pense que nous devrions tous réfléchir au temps que nous passons sur les réseaux sociaux et autres activités, et demander pardon pour cela. Ce temps aurait pu être consacré à reconnaître et glorifier Allah ﷻ, à faire preuve de piété envers Lui, et à chercher à gagner notre place au paradis. 

J’ajouterais également qu’avoir des objectifs clairs renforce notre confiance en Allah ﷻ et en nos capacités données par Lui pour atteindre ces objectifs.

Ajuster sa voix

La voix des ânes

Généralement, nous n’apprécions pas ceux qui parlent fort, qui crient. Luqman mentionne également quelque chose de fort, c’est que la voix la plus détestée, c’est celle des ânes. En effet, si tu as déjà entendu un âne braire, tu sais que ce n’est pas la voix la plus agréable ni la plus poétique.

Donc quand on dit de quelqu’un qui parle fort tout le temps, que c’est comme le braiement d’un âne et que c’est la voix la plus détestable, il y a quelque chose à retenir ici. 

Celui qui élève trop la voix cherche de l’attention. Sinon, il n’élèverait pas la voix, car quand tu ne veux pas attirer l’attention sur toi, tu ne parles pas fort. Et tu n’as pas besoin de cette attention-là lorsque tu as des objectifs, parce que les bonnes personnes viendront à toi au bon moment. 

Tu n’as pas besoin, quelque part, là aussi, c’est une expression que j’aime bien dire : tu n’as pas besoin de « vloguer » ta vie, d’accord ? Tu n’as pas besoin de diffuser chaque détail de ta vie, de « podcaster » ton temps, ce que tu fais, tes détails, ce que tu as mangé à midi… 

En effet, si tu as des objectifs clairs, tu es plus occupé à les atteindre qu’à montrer aux gens des étapes qui ne font même pas partie de ton objectif.

Adopter le bon ton avec la bonne attitude

Donc le fait de tempérer sa voix, c’est quelque chose de très important. D’ailleurs, quand tu regardes les grandes figures, les grands leaders, les gens sages, les gens qui ont de la « hikma« , les gens que tu aimes écouter, je pense que ce ne sont pas des gens qui hurlent, qui brillent, qu’on entend à des kilomètres. 

Dès qu’une personne crie ou parle très fort, elle perd une partie de son auditoire, en tout cas ceux qui sont juste à côté n’ont pas envie d’écouter. Quand quelqu’un te crie dessus à chaque fois qu’il parle, tu n’as pas envie d’écouter. Alors qu’on a envie d’écouter une personne qui : 

  • est posée, 
  • te parle doucement, 
  • parle correctement,
  • a une voix audible, 
  • a une présence, sans être envahissante, 
  • n’est pas orgueilleuse, 
  • est reconnaissante,
  • est humble.

Une anecdote personnelle

Il faut se rappeler que ce n’est pas pour rien qu’Allah ﷻ parle de Louqman, un homme qui parle à son fils. Il aurait pu parler à sa fille. Nous avons des exemples de gens sages qui parlent avec leur fille, comme la femme de Moussa qui parlait avec son père. Mais le fait qu’Allah mentionne un père et qu’elle parle à son fils et non à sa fille ou sa femme, montre également que les hommes doivent se sentir encore plus touchés et concernés ici.

Luqman nous enseigne de grandes leçons de paternalité, de parentalité, de compagnonnage et de qawwama. 

En relation justement avec cette histoire de voix, cela me rappelle une anecdote, une discussion récente que j’ai eue avec mon papa, qu’Allah ﷻ le protège, où je lui parlais justement de paroles que moi et des amies pensions. Je disais : 

« Papa, je parlais avec telle amie, et nous en sommes venues à la conclusion que les hommes comme toi, les vrais qawwam, je pense que c’est une espèce en voie de disparition, il n’y en a pas autant que ça. » 

Il a souri et m’a interrompu immédiatement en disant :

« Non, il y en a beaucoup, il y en a plein. » 

Je lui ai demandé de m’expliquer. Il a dit : 

« Il y en a plein, mais les vrais hommes, un qawwam, ça ne crie pas. Ça ne parle pas fort et partout, ça n’occupe pas trop d’espace. En fait, les hommes bons ont des objectifs clairs, ils sont occupés. Ils ont des objectifs de vie, et ils ne braillent pas comme ceux qui sont en train de brailler. En fin de compte, les gens qui braillent, ceux qui ne sont pas qawwam doivent vendre leur mérite et leur personne autrement qu’en étant qawwam. Donc, du coup, c’est très compliqué à combler. Donc la voix emplit l’espace, aussi, il dit cela, tu sais, ils sont tellement bruyants, ils prennent tellement de place, ils passent tellement de temps à appeler le monde autour d’eux et à eux, qu’ils font de l’ombre aux qawwam. Ces hommes qawwam, plein de sagesse, sont aussi dans leurs objectifs. Alors, non seulement les hommes bien et les femmes bien sont nombreux, mais ils sont discrets. 

C’est comme toi et tes copines qui sont bien éduquées, vous êtes discrètes, des amis qui ne sont pas encore mariées, elles sont pareilles, ce sont des personnes tempérées dans leurs démarches, dans leurs voies, qui ont des objectifs clairs. Ainsi il faut être positifs, il faut voir les choses d’un œil toujours positif, les gens sages, les gens qui font preuve de hikmah, les qawwam et les salihat, finiront toujours par se trouver mutuellement. 

Regarde, c’est comme Oumounâ Khadija, رضي الله عنها, elle a trouvé RassulAllah, comme lui a trouvé sa Khadija. Moussa, عليه السلام, a trouvé son épouse au bout d’un désert, alors qu’il était en train de prendre la fuite, et de la même façon elle l’a trouvé. Les deux étaient discrets, on ne peut pas voir plus discrets que Moussa عليه السلام. Elle aussi était très discrète, Allah ﷻ parle même de sa démarche, comme une démarche humble et timide. Pourtant, c’est dans ce désert-là qu’Allah ﷻ les a fait se trouver. 

Les chemins et les objectifs des qawwam et des salihat sont clairs. Les chemins des gens moins biens et ceux des gens biens peuvent se rapprocher, mais ils resteront toujours parallèles, ils ne se rencontreront jamais vraiment, même s’ils semblent se croiser, ce n’est pas véritablement le cas. 

Sans le réaliser, il m’avait éclairée sur une sagesse que Luqman a mentionnée au sujet de la voix, que les hommes bons, bien éduqués, qawwam, sont des gens tempérés dans tout.

Qu’Allah ﷻ fasse que chaque salihah trouve son qawwam, et chaque qawwam trouve sa salihah.

 Ce sont des graines à faire germer, il faut qu’elles germent dans de bonnes conditions. Il y a un environnement à créer pour que la plante puisse grandir correctement avant d’être replantée en pleine terre. On ne peut pas faire n’importe quoi, n’importe quand, avec n’importe quelle terre. 

Nous demandons donc à Allah ﷻ de faire en sorte que ces graines rencontrent le bon terreau, la bonne personne, dans le bon environnement au bon moment pour qu’elles deviennent de magnifiques plantes, produisant de beaux fruits, etc.

Ce qu’il faut retenir du récit de Luqman 

Après un article aussi long sur Luqman, j’espère que dorénavant, tu le verras sous un œil encore plus bienveillant, profond et reconnaissant. 

Des conseils à appliquer avec le Coran

Cet homme a beaucoup à nous enseigner et comme lui enseigne à son fils, étape par étape, c’est le même conseil que je te donne finalement pour ta compréhension du Coran, que ce soit pour :

  • ton apprentissage, 
  • ta lecture, 
  • ta méditation. 

Chaque chose s’acquiert étape par étape. Si tu viens de commencer à lire l’arabe et que tu penses déjà à la mémorisation complète du Coran comme un objectif à atteindre immédiatement, cela risque de devenir décourageant. Cela risque d’être difficile et à la moindre difficulté, dès que tu buteras un peu, tu risques de te dire que tu n’y arriveras pas. Alors que si tu te concentres sur la lecture de quelques sourates à la fois, et que tu progresses pas à pas, tu éviteras cette démotivation. 

La compréhension, la méditation, tout cela se fait étape par étape.

Un travail sur le long terme

Si tu cherches à comprendre toute une sourate d’un seul coup, de toute façon, c’est impossible. J’ai étudié cette sourate, Luqman, en profondeur il y a trois ans lors d’un séminaire et je l’ai mémorisée il y a plus de 20 ans. Même après toutes ces années, il n’y a jamais eu une seule fois où je n’ai pas découvert une nouvelle hikmah dans cette sourate. 

Parfois, un savant en parle d’un aspect que je n’avais pas remarqué, parfois je lis un tafsir que je n’avais pas pleinement compris et tout à coup cela s’éclaire. Parfois, une discussion avec quelqu’un, comme avec mon père, m’amène à réaliser de nouvelles choses. 

Comme le dit Luqman : 

  • étape par étape, 
  • avec des objectifs clairs,
  • en ne s’écartant pas de sa voie, 
  • en tempérant sa démarche, 
  • en manifestant reconnaissance et humilité, 
  • en célébrant la prière. 

Celui qui a saisi toutes ces leçons, la prière prend tout son sens. La prière, comme Luqman en parle, est vraiment au cœur de tout, elle accomplit tout, elle renforce le lien avec Allah ﷻ. 

Nous devrions être reconnaissants tout au long de notre journée, à chaque étape, en ne souhaitant qu’une chose : poser le front par terre. Nous aspirons à ce moment de connexion directe et profonde avec Allah ﷻ pour Lui exprimer notre gratitude par la prosternation. La prière engendre encore plus de bénédictions, et ainsi de suite, donc nous sommes redevables tout le temps, à chaque instant.

On a toujours des objectifs, et l’être humain, ça tombe bien, n’aime pas la monotonie, n’aime pas l’ennui. Notre vie n’est pas ennuyeuse lorsqu’on est un serviteur d’Allah ﷻ …

Si tu aimes ces portraits de grands acteurs du Coran, tu vas très certainement aimer cet article :

illustration épingle Pinterest sur Luqman
citation de l'épisode de podcast sur Luqman
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