Votre Oustadha Zaynab applique enfin ses propres conseils et sera en congé du 8 juillet au 31 août. Pendant cette période, je prends le temps de me reposer pour revenir avec une meilleure énergie. Seules les demandes et les mails concernant la formation "Coran de ma vie" seront traités par mon équipe. À très bientôt, insha'ALLAH.

Renouveler sa parentalité

Temps de lecture estimé : 47 min.

Il est nécessaire de réfléchir à de nombreux aspects auxquels on ne pense pas toujours, mais sur lesquels nous devons pourtant nous réformer. Aujourd’hui, nous aborderons un sujet important, la parentalité. Il est temps de renouveler notre approche de la parentalité, surtout avec l‘évolution de notre société. Pour parler de ce sujet, j’ai convié une spécialiste : Sabrina, également connue sous le pseudonyme « chez maîtresse Sabrina » sur les réseaux sociaux. Sabrina est une personne que j’admire énormément pour son travail et sa pédagogie. De plus, elle est tout simplement mon amie et a même enseigné à mes enfants, ce dont je suis très fière. C’est parti pour parler ensemble de comment et pourquoi renouveler sa parentalité, mais avec une approche inhabituelle, empreinte de bienveillance, de franchise, d’authenticité et de sincérité, comme à notre habitude, dans une atmosphère chaleureuse et accueillante.

Sommaire

Les présentations

Sabrina : Comme mon pseudonyme Instagram l’indique (@chezmaitressesabrina), je suis enseignante, principalement en maternelle depuis 2009. Tout au long de ma carrière, j’ai exploré différentes pédagogies, notamment la pédagogie Montessori.

À chaque fois que je rencontrais des difficultés avec un enfant dans ma classe, je décidais de me former davantage pour mieux l’accompagner. Ainsi, j’ai acquis des compétences dans l’accompagnement des enfants autistes, la communication bienveillante et ferme, entre autres. Je me suis donc intéressée à différentes approches pédagogiques, dans le but de répondre aux besoins spécifiques de chaque enfant, car chacun est unique. C’est une véritable passion pour moi.

En tant que maman, je navigue entre l’adolescence et la petite enfance, ayant deux grands adolescents et une petite fille de trois ans. C’est d’ailleurs ma fille de trois ans qui m’a poussée à sortir de ma salle de classe et à commencer à accompagner les enseignants et les parents dans la mise en place d’un cadre ferme et bienveillant, tant à l’école qu’à la maison.

J’utilise l’approche Faber et Mazlish, dont je parle abondamment sur mon compte Instagram et avec laquelle je forme des parents. Je recommande vivement cette approche à toutes les mamans, tous les enseignants, tous les parents.

Zaynab : Je recommande vraiment cette formation. Comme je l’ai récemment partagé sur les réseaux sociaux, c’est une “douce claque” ! C’est une révélation, une prise de conscience douce mais puissante, qui remet les pendules à l’heure.

Cela demande beaucoup d’humilité, et on se rend compte qu’avec cette qualité, on apprend énormément de choses. Cela remet en question nos idées sur la récompense, la punition et l’accueil des émotions. Tout d’abord, il est important de réaliser qu’en tant qu’adultes, nous ne percevons pas toujours l’enfant comme il le faudrait. Parfois, nous ne le voyons pas à travers un prisme adulte, et nous ne nous mettons pas suffisamment à sa place. Par conséquent, nous ne comprenons pas toujours ce qu’ils ressentent, nous leur prêtons des intentions sans vraiment les comprendre, et notre réaction n’est pas toujours adaptée.

Je suis très reconnaissante à Sabrina de nous permettre d’apprendre cela, et je suis également reconnaissante que nos chemins se soient croisés. C’est un plaisir de constater que dans notre communauté, il y a des personnes qui enseignent ces méthodes, qui, en fin de compte, sont des méthodes prophétiques, comme on peut le constater.

Les ayat qui ont motivé l’épisode

sourate al fourqan versets 73 et 74 ainsi que la traduction du sens

Ce sont des versets vraiment magnifiques. Allah ﷻ parle de ceux qui, lorsqu’ils entendent les versets de leur Rabb, ne restent pas indifférents. Il y a des moments où nous oublions les choses, où nous nous éloignons de ce que nous savions, ou tout simplement où nous ne savions pas.

Je pense que nous savons intrinsèquement certaines choses, et elles nous reviennent à un moment donné, que ce soit à travers les épreuves de la vie ou des formations comme celle-ci.

Il y a un moment où nous faisons un constat, comme lorsque nous faisons notre Shahada (attestation de foi). À ce moment-là, nous réalisons que nous adorons Allah ﷻ non seulement parce que nos parents nous l’ont enseigné, mais par conviction personnelle.

Lorsque ces personnes, comme nous aujourd’hui, entendent les versets de leur Seigneur, à partir de ce moment-là, elles ne deviennent ni sourdes ni aveugles. C’est comme une décision que nous prenons, une résolution où nous disons désormais que nous ne serons plus sourds ni aveugles à nos responsabilités, à ce que nous pouvons mettre en place, aux réalités qui nous entourent. Nous prenons tout cela en compte et passons à l’action.

Nous savons que tout ce que nous pouvons réaliser est grâce à Allahﷻ seul. Notre force n’y est pour rien. Nous disons :

لاَحَوْلَ وَلَا قُوَّةَ إِلَّا بِاللّهِ
la hawla wa la quwwata illa billah
Il n’y a en fait de force ni de puissance que celle d’Allah.

Ces personnes que nous admirons disent « notre Rabb, accorde-nous de Ta part une issue ». Il y a là une part de nous où nous avons l’obligation des moyens, et Allah se charge des résultats.

Donc, ces versets sont considérés comme étant parmi les plus beaux, que beaucoup de savants considèrent comme une des plus belles invocations que l’on peut faire pour :

  • notre famille, notre époux ou épouse,
  • notre descendance, toute notre lignée à venir
  • la communauté.

Cela montre que nous réfléchissons à long terme en tant que groupe. Nous demandons à Allah ﷻ de nous accorder tous ces bienfaits, tous ces acteurs de joie pour nos yeux.

famille musulmane

Et lorsque nous utilisons l’expression  » قُرَّةَ أَعْيُنٍۢ » (la joie des yeux), cela englobe vraiment :

  • la joie,
  • la sakina,
  • la tranquillité,
  • le bonheur,
  • le bien sous toutes ses formes

C’et un mélange de nombreux sentiments profonds.

Ainsi, nous demandons à Allah ﷻ de nous accorder tous ces biens et bénédictions sous différentes formes, afin que nous soyons heureux en les voyant, en pensant à eux, en les observant agir, ou même en entendant parler d’eux. De plus, nous Lui demandons de faire de nous des guides pour les pieux.

L’importance de l’unité et de la solidarité

Allah ﷻ nous demande également d’agir pour la société dans son ensemble. Nous éduquons nos enfants pour qu’ils deviennent des membres actifs de la société et qu’ils ne restent pas confinés à la maison.

Allah ﷻ nous demande de nous engager :

  • dans la société,
  • dans l’humanité,
  • dans la communauté.

Le choix des mots est très significatif ici, car dans cette invocation, Allah ﷻ parle à la première personne du pluriel. Ca implique que nous faisons cette invocation en tant que communauté. Allah ﷻ n’appelle pas à l’individualité, Il nous encourage ainsi à penser au bien-être des autres.

Effectivement, cette utilisation singulière de « imam » dans l’invocation est fascinante, tant en arabe qu’en français. C’est le terme qui désigne :

  • un guide
  • un exemple
  • un leader

Normalement, on s’attendrait à ce que cela soit au pluriel, mais Allah ﷻ choisit de dire « un imam », ce qui attire l’attention sur quelque chose de particulier.

Lorsque des conventions grammaticales sont contournées de cette manière, cela souligne souvent un point important. Il met en lumière le fait que lorsque nous agissons en tant que guides ou exemples, nous devons être unis et solidaires en tant que groupe, même dans nos actions individuelles. En agissant individuellement, nous devons penser collectivement, et lorsque nous agissons collectivement, nous ne faisons qu’un.

Préparer nos enfants tout en étant soumis à la volonté d’Allah ﷻ

Sabrina : Je trouve également que ce verset est puissant car il part d’un constat. Nous sommes confrontés aux signes de notre Seigneur, que ce soit dans nos difficultés parentales, nos défis éducatifs, ou simplement dans notre relation avec nos enfants. Il nous faut être humbles, nous remettre en question, et ensuite agir pour changer les choses. Nous devons réfléchir à ce que nous pouvons faire pour :

  • améliorer notre foyer,
  • donner à nos enfants une meilleure éducation,
  • les préparer à leur place dans la société.

C’est une responsabilité cruciale qui demande notre attention et notre réflexion constantes.

En effet, l’enfant que nous éduquons à la maison, le petit garçon ou la petite fille que nous chérissons aujourd’hui, seront les époux et épouses de demain, et ils seront des membres actifs de la société.

J’apprécie énormément cette douaa car elle nous déculpabilise en quelque sorte. En tant que parents, nous avons une obligation de moyens, mais nous n’avons pas d’obligation de résultats. Ces résultats relèvent uniquement de la volonté d’Allah ﷻ. C’est pourquoi il est si important de mettre en place des choses tout en priant pour nos enfants, en invoquant pour eux.

Parfois, je plaisante en disant qu’en tant que parents, nous devrions consacrer un qiyam par semaine à nos enfants, !

Zaynab : Mais en réalité, c’est une obligation individuelle de prendre du temps chaque semaine, autant que possible, uniquement pour nos descendants.

Sabrina : Exactement, c’est une immense responsabilité que nous avons, et nous devons nous efforcer de l’accomplir au mieux. Cependant, nous devons aussi nous rappeler que nous ne sommes que des moyens, et que le véritable guide est Allah ﷻ. C’est Lui qui guide et choisira la meilleure voie pour nos enfants.

Le Ramadan, l’opportunité de renouveler sa parentalité

Zaynab : Cet épisode intervient dans cette série d’épisodes de préparation au Ramadan. Alors pourquoi ? Parce que nous abordons tous les sujets qui peuvent contribuer à rendre ce Ramadan meilleur que les précédents. Et cela inclut certainement notre rôle en tant que parents et notre responsabilité envers nos enfants. C’est un aspect essentiel de notre préparation spirituelle et de notre engagement envers notre famille et notre communauté.

Sabrina : Ce que je remarque, c’est que nous sommes souvent inondés de propositions à l’approche de ce mois béni, que ce soit en tant que mères ou enseignantes, surtout si nous évoluons dans des milieux éducatifs musulmans. Nous avons toute une gamme d’idées, de décorations, de livres et d’activités à proposer à nos enfants sur le thème du Ramadan, afin de les plonger dans cette atmosphère spirituelle. Et c’est magnifique, je ne dis pas le contraire, je l’encourage même.

Cependant, je pense qu’il serait bon de rappeler le véritable objectif de ce mois sacré. Le Ramadan est une école, une période où nous sommes censés sortir de ce mois meilleurs que quand nous y sommes entrés. En ce qui concerne nos enfants, pourquoi ne pas profiter de ce mois pour :

  • faire un examen de conscience en tant que parents ?
  • prendre humblement le temps de réfléchir à notre relation avec nos enfants ?
  • réfléchir à ce que nous faisons bien, de mal, ce que nous pourrions améliorer ?

Nous avons tous des axes d’amélioration, et le Ramadan peut être l’occasion de renouer et de renforcer nos liens avec nos enfants.

Le renouvellement de la relation parent-enfant

Zaynab : Absolument, c’est comme une mise à jour de notre relation avec nos enfants, voire même plus que cela. Nous constatons ce qui ne fonctionne pas, nous déconstruisons les schémas néfastes, puis nous nous tournons vers les sources authentiques pour reconstruire sur des bases solides. C’est une question d’humilité de reconnaître que ce que nous faisions jusqu’à présent n’était peut-être pas tout à fait correct, et de nous référer aux enseignements véritables pour guider nos actions.

Comme je l’ai mentionné dans les épisodes précédents, je tiens toujours à souligner l’importance du Ramadan. Ce que nous mettons en place pendant ce mois béni sera plus difficile à mettre en place en dehors de celui-ci :

  • Les bonnes habitudes,
  • les résolutions,
  • la demande de pardon,
  • l’acceptation de nos erreurs, etc.

Cela ne signifie pas que nous ne pouvons rien faire en dehors du Ramadan, mais ce mois béni peut véritablement être un moment décisif dans nos vies. Il ne s’agit pas de devenir une personne totalement différente du jour au lendemain, mais plutôt de formuler une intention sincère de s’améliorer et de se rapprocher d’Allah ﷻ.

Absolument, c’est pourquoi je veux aborder ces sujets avant le Ramadan. Ainsi, je peux formuler cette intention et me dire que pendant ce mois sacré, je pourrais au moins observer chaque interaction que j’ai avec mes enfants. Ca se signifie pas que je serai parfaite, mais je verrai comment :

  • je réagis,
  • j’écoute,
  • je réponds à leurs besoins.

Nous pourrions en discuter en détail aujourd’hui, mais simplement prendre conscience de nos actions serait déjà un bon début.

Dépasser le constat et s’engager

L’être humain ne se contente pas seulement de constater, nous voulons agir. Nous voulons mettre en place des changements. Et le Ramadan est le mois où Allah ﷻ facilite grandement ces changements. Nous devons donc en profiter, mettre du “carburant“ de qualité, afin que le reste de l’année soit une continuation de ce travail.

Dans un premier temps, nous avons écouté les versets qui nous ont parlé du constat. Maintenant, nous ne voulons plus être sourds ni aveugles. Nous voulons voir et pour cela, nous devons examiner :

  • nos actions,
  • notre environnement,
  • notre culture,
  • la société dans laquelle nous vivons,
  • notre époque,
  • toutes les influences qui nous entourent (technologie, réseaux sociaux, etc.)

Ces éléments ont un impact énorme sur nous et nous devons en prendre conscience.

Que peut-on dire sur la société actuelle ?

Sabrina : Etre parent en 2024 présente de nombreux défis. Nous ne pouvons pas nous contenter de reproduire l’éducation que nous avons reçue, même si nous sommes reconnaissants envers nos propres parents pour les valeurs qu’ils nous ont inculquées. Nos enfants grandissent dans une société différente de celle dans laquelle nous avons grandi, ce qui nécessite une adaptation de notre approche éducative.

Un exemple concret de ces défis est l’accès précoce des enfants aux réseaux sociaux, et notamment à la pornographie. C’est un problème répandu, même au sein de notre communauté. C’est pourquoi il est essentiel de ne plus seulement écouter nos enfants, il faut également :

  1. Nous mettre à leur niveau,
  2. Être leurs confidents
  3. Construire une relation de confiance avec eux.

Ainsi, s’ils sont confrontés à des situations difficiles ou à des tentations, ils sauront qu’ils ont un parent sur qui compter pour les guider avec bienveillance et les accompagner dans la résolution des problèmes.

Cependant, je tiens à préciser que cela ne signifie pas que nous devons accepter tout comportement. Il est important d’établir des limites claires et de les faire respecter, tout en restant ouverts à la communication et à la résolution des problèmes ensemble.

Effectivement, l’idée n’est pas de pardonner tout le temps à l’enfant sans mettre de cadre. Il s’agit plutôt de faire preuve de bienveillance tout en établissant des limites et en étant ferme. La base de tout cela réside dans l’écoute réelle et l’accueil des sentiments de l’enfant.

La nécessité d’en finir avec les punitions physiques

Zaynab : Aujourd’hui, les sentiments sont souvent réprimés, non seulement chez les enfants mais aussi chez les adultes, ce qui se traduit par un manque d’écoute et d’attention envers les enfants. Cela se reflète également dans notre façon de répondre à leurs comportements. Par exemple, la notion de punition doit être remise en question, surtout les punitions physiques ou corporelles.

Il est difficile de comprendre comment on a pu penser qu’en frappant un enfant, on pourrait le faire obéir et grandir dans un environnement émotionnellement sécurisé. Les châtiments corporels sont en réalité une humiliation pour l’enfant.

Nous avons récemment discuté de l’origine des punitions physiques dans nos cultures respectives, et cela soulève des questions sur la manière dont ces pratiques ont été perpétuées et acceptées. En réalité, il est essentiel de reconnaître les effets néfastes de ces méthodes et de chercher des alternatives plus respectueuses et efficaces pour éduquer nos enfants.

Sabrina : Quand on étudie la sirah, on voit que le Prophète ﷺ était à l’écoute des enfants, combien il était doux, le fait qu’il n’ait jamais frappé un enfant, etc.

Je me suis toujours demandé comment se fait-il que de nos jours, les châtiments corporels soient hyper répandus dans nos sociétés ? Quand je parle de nos sociétés, je parle de nos cultures d’origine, Maghreb, Afrique de l’Ouest, etc.

Même dans les écoles coraniques, pourquoi il y a toujours cette répression d’utiliser le bâton, de frapper l’enfant quand il n’a pas mémorisé ? Je n’arrivais pas à comprendre comment on en arrivait là. J’ai fait quelques recherches, alors je n’ai pas encore assez approfondi le sujet pour en faire une vérité absolue, mais il y a certains sociologues qui ont étudié cela et qui disent qu’avant l’avènement des colons, en Afrique de l’Ouest, au Maghreb, la fessée, le fait de frapper, n’existait pas. Ça a été apporté par la colonisation française, belge, etc.

Zaynab : Surtout que très souvent, c’étaient des tribus nobles, il y avait des dynasties, etc. Je parle surtout de l’Afrique subsaharienne que je connais bien. L’enfant était respecté. Si une personne faisait preuve de violence physique envers un enfant, elle était considéré comme une cause perdue. C’est-à-dire que tu étais tellement faible que tu n’avais plus d’autre moyen de t’exprimer pour ton enfant qui est censé être précieux, qui est ta progéniture. Entre les maladies, le climat, etc. quand ils avaient un enfant qui survivait, qui allait faire perdurer la descendance, ils faisaient tout sauf le maltraiter. Ils traitaient les enfants correctement parce que c’étaient leurs témoins pour les générations futures, c’était leur descendance.

Le modèle du Prophète ﷺ, notre boussole

Sabrina : c’est quand même quelque chose qu’il faut garder dans un coin de sa tête :

  • A quoi je m’attache, en tant que musulman en 2024 ?
  • Qu’est-ce que je prends comme exemple dans l’éducation de mes enfants ?
  • Est-ce que je prends ce qui m’ a été transmis sans vraiment m’interroger sur ce qui m’a été transmis ?
  • Est-ce que je vais regarder le meilleur des exemples ?

Et le meilleur exemple, c’est celui du Prophète ﷺ. Il suffit de s’interroger, est ce qu’il a déjà frappé un enfant pour :

  • n’avoir pas mémorisé sa sourate ?
  • avoir été dérangé pendant la prière ?
  • n’avoir pas mangé proprement dans l’assiette ?

C’est notre exemple, c’est notre modèle. Dans mes ateliers, je transmets l’approche Faber et Maslisch, mais ils n’ont rien inventé, tout est dans notre religion :

  • Le fait d’être à l’écoute des enfants,
  • L’accueil des émotions,
  • Ne pas nier ce qu’ils ressentent, etc.

C’est simple : le Prophète ﷺ levait la main sur les gens sur le champ de bataille, mais jamais en dehors. C’est là qu’il fallait frapper. Autrement, il n’infligeait pas de violence, que ce soit envers les femmes ou les enfants. Lorsque je parlais de cela avec une personne, celle-ci m’a répondu quelque chose qui m’a fait réfléchir :

« Oui, mais c’était le Prophète ﷺ, il était parfait. Il avait un caractère excellent et Allah lui avait donné la patience et la capacité de tout supporter. »

Le Prophète ﷺ et les enfants

En entendant cela, je me suis dit qu’il y a beaucoup de choses que nous ne comprenons pas. J’ai répondu :

« Certes, le Prophète ﷺ était parfait. Mais les gens qui étaient autour de lui ne l’étaient pas forcément. »

En effet, les enfants qu’il côtoyait étaient comme tous les enfants : ils jouaient, couraient, pleuraient, etc. Et pourtant, le Prophète ﷺ a dû faire face à toutes ces situations.

Alors tu me demandais comment était le Prophète ﷺ avec les enfants ? Pour y répondre, il faut d’abord remarquer combien d’enfants étaient autour de lui.

  • Son entourage. Nous savons qu’il fréquentait beaucoup de familles, qu’il était souvent chez elles, et qu’il y avait aussi des enfants en bas âge.
  • La famille de son oncle. Il fréquentait beaucoup son oncle, qui avait des enfants en bas âge.
  • Les enfants de Khadija. Il s’est marié avec Khadija qui était veuve et qui avait déjà des enfants. Il est donc devenu beau-père sans hésitation, prenant soin de ces enfants comme s’ils étaient les siens.
  • Son petit cousin, Ali. Il l’a pris sous son aile pour soulager son oncle qui vivait une situation difficile.
  • Ibn Abbas, un autre de ses cousins
  • Zayd. Il l’a adopté et élevé comme son propre fils.
  • Les enfants de Oum Salama. Lorsqu’il s’est marié avec Oumm Salama, une autre veuve avec des enfants en bas âge, il lui a assuré qu’il prendrait soin de ses enfants.
  • Ses propres enfants. Il en a eu qui ont grandi auprès de lui, quatre filles, dont l’aînée se nommait Aïcha.

Il n’a jamais fait de distinction entre ses enfants biologiques et ceux de ses épouses. C’est un rappel important pour ceux qui marginalisent les femmes divorcées ou veuves avec des enfants. En réalité, c’est une richesse. Ce n’est pas anodin que le premier mariage du Prophète ﷺ ait été avec une femme qui avait déjà été mariée et qui avait des enfants. Cela faisait partie de sa formation en tant que Prophète.

Comment pourrait-il élever une société s’il ne comprenait pas ses diversités ? Sa formation a commencé avec sa propre famille, et je tiens vraiment à souligner cela.

Ainsi, il est crucial de remettre les choses en perspective et d’arrêter d’isoler des membres de notre communauté alors qu’Allah Lui-même ne l’a pas fait. Au contraire, il les a honorés dans notre société. Il y a beaucoup d’enseignements à tirer de cela. Il est donc très important de le garder en mémoire.

Le Prophète ﷺ, qui est l’exemple que nous sommes censés suivre, n’a rejeté personne. Tous ceux qui venaient à lui se sentaient les bienvenus. Il a traité les enfants de ses épouses, qui n’étaient pas ses enfants biologiques, comme les siens.

Un hadith à prendre en exemple

Sabrina : Il y a une scène très intéressante que je vais vous raconter à propos d’Anas ibn Malik. C’est une hadith que j’aime expliquer lorsque, parfois, on me dit :

« Sabrina, tu exagères. En tant que mère, nous avons tellement de choses à faire. En tant qu’enseignante, nos journées sont bien remplies. Est-ce que nous pouvons vraiment être à l’écoute de nos enfants ? Est-ce que nous pouvons vraiment prendre le temps de les écouter avec nos vies qui vont à 1000 à l’heure ? »

J’’aime donner cet exemple pour revenir à la source, qui est notre Prophète, notre exemple. Le Prophète Muhammed vivait avec Anas ibn Malik et avait l’habitude en fin de semaine, d’aller rendre visite à la famille d’Anas. Anas avait un petit frère dont la passion, si je peux dire, était d’élever des oiseaux. Il adorait prendre soin de ses oiseaux avec beaucoup d’attention. Ce petit garçon devait avoir environ 4 ou 5 ans, si je ne me trompe pas.

Et donc, le Prophète , en tant que père de famille, chef religieux et chef politique, dirigeait Médine à l’époque. Mais quand il allait rendre visite à la famille d’Anas, il prenait le temps de s’asseoir avec son petit frère pour prendre des nouvelles de ses oiseaux. Un jour, lors d’une de ces visites, il a vu le petit garçon vraiment très triste. Il s’est assis à côté de lui pour lui demander ce qui se passait. Et le petit lui a expliqué que son petit oiseau était mort.

Au lieu d’avoir la réaction que nous avons parfois lorsque nos enfants perdent quelque chose qui nous semble insignifiant, comme une collection de petits cailloux ou un dessin déchiré par un frère, le Prophète a réagi différemment. Il s’est simplement assis à côté de lui et l’a écouté. Il n’a pas minimisé son émotion. En d’autres termes, il a reconnu que son émotion était légitime et a exprimé son empathie envers lui. Cet exemple est très significatif car il montre que même avec un emploi du temps très chargé, comprenant cinq prières à diriger à la mosquée et la gestion des affaires de la communauté, le Prophète a pris le temps de s’asseoir auprès d’un petit garçon qui n’était même pas son propre fils. Il lui a simplement accordé son écoute et n’a pas ignoré ses sentiments.

Les leçons à tirer de cette anecdote

Cet exemple est vraiment incontestable. Il est puissant. Il met en lumière que si nous voulons que nos enfants nous parlent de leurs grandes difficultés, nous devons les écouter lorsqu’ils nous parlent de leurs petits problèmes. Si nous voulons que nos enfants nous abordent à l’adolescence pour nous parler de ce qu’ils vivent au collège ou au lycée, nous devons les écouter dès leur petite enfance.

En tant que mère d’adolescents, je peux vous dire qu’ils traversent des épreuves au collège et au lycée qui nous dépassent. Le monde évolue rapidement, même si nous-mêmes sommes sur les réseaux sociaux, par exemple.

Donc, si nous voulons que nos enfants viennent nous voir, nous parlent et se confient à nous pour obtenir notre avis, nous devons les écouter dès le plus jeune âge. Nous devons nous asseoir avec eux, les écouter, ne pas nier leurs sentiments, puis les accompagner avec bienveillance mais aussi avec fermeté, comme l’a fait le Prophète Muhammed avec ce petit garçon.

Cela ne signifie pas pour autant que nous devons laisser nos enfants faire ce qu’ils veulent. Ils ont besoin d’un cadre, de limites, qui sont nécessaires à leur développement.

Mais il y a des façons de poser ces limites. Malheureusement, comme tu l’as mentionné tout à l’heure, il y a des personnes qui rejettent cet exemple en disant :

« Oui, mais c’était le Prophète Muhammed . »

Un manque d’outils… Vraiment ?


Malheureusement, nous manquons parfois d’outils et de prise de conscience, car nous ne prenons pas toujours le temps d’examiner nos modes de communication avec les enfants. Dans mes ateliers, nous commençons toujours par des exercices qui nous permettent de changer de perspective. Nous essayons de nous mettre à la place de l’enfant pour comprendre ce qu’il ressent lorsque nous lui disons ou imposons quelque chose.

À partir de cette prise de conscience, nous cherchons des moyens d’améliorer notre manière de guider, d’éduquer et de fixer des limites à nos enfants, tout en faisant preuve de fermeté et de bienveillance. En fin de compte, l’objectif est de préserver une relation saine et de confiance avec nos enfants.

Zaynab : C’est vraiment inspirant. Nous pourrions en discuter pendant des heures. L’exemple avec Anas ibn Malik est très frappant, tout comme ce que tu as mentionné aujourd’hui sur l’importance d’accueillir les émotions des enfants. Parfois, nous pensons manquer d’outils, mais en réalité, nous en avons beaucoup à notre disposition, notamment dans le Coran. Ce que j’apprécie également avec la Sunnah et les exemples mentionnés dans le Coran, c’est qu’ils nous fournissent des enseignements précieux sans que nous ayons besoin de chercher loin.

La transmission des émotions dans le Coran


Il est essentiel d’observer comment Allah traite les prophètes à travers les exemples qu’il nous donne. Regardez comment Allah est à l’écoute des émotions de Ses prophètes. Il nous offre de nombreux passages dans ce livre illustre où nous pouvons voir des scènes d’émotions vécues par Ses prophètes, et Allah décrit sans les juger.

C’est assez important pour qu’il les laisse là. Il aurait pu ne pas donner ces détails, mais il les expose sans jugement. Cela renvoie à ce que nous disions récemment : si quelqu’un a le droit de juger, c’est Allah . Pourtant, Allah parle des émotions des prophètes sans porter de jugement.

Il y a des passages qui me viennent à l’esprit.

Moussa et Haroun

Lorsque Moussa rencontre Allah pour recevoir les commandements, la Torah, il confie son peuple à son frère, le prophète Haroun. Quand il redescend et voit que son peuple est tombé dans la débauche, qu’ils adorent un veau d’or et ont une nouvelle divinité, il est pris d’une colère noire. Il est rouge de colère, il n’est pas du tout content. Allah immortalise cet instant en décrivant l’émotion de Moussa. En effet, lorsqu’il exprime sa colère, Il dit

“ غَضْبَٰنَ أَسِفًۭا”

Il est tellement énervé qu’il jette les tablettes de commandements sur le veau d’or. Puis, il attrape son frère Haroun, comme si cela ne suffisait pas, même si c’est son grand frère. Il l’attrape par la barbe, et Haroun lui dit :

« Ô fils de ma mère ! Ne me saisis pas par ma tête ni par ma barbe. »

Puis, Haroun explique que lorsque la corruption et la débauche sont apparues, il a fait de son mieux, mais que la situation l’a dépassé. Il s’agit de tout un peuple, composé de plusieurs tribus, une génération entière qui a quitté l’Égypte, échappant au joug de Pharaon, et qui nécessite une guidance. Haroun se retrouve seul avec eux, et Moussa réagit en exprimant sa colère, une réaction qu’Allah immortalise sans jugement.

Allah ne lui reproche pas d’avoir agi ainsi. Si nous étions à sa place, en tant qu’êtres humains normalement constitués, quelle autre émotion ou réaction aurions-nous pu avoir ? Il avait toutes les raisons d’être en colère, compte tenu de tout ce qu’Allah avait fait pour eux. Ils étaient libérés du joug de Pharaon, et Moussa était prêt à leur transmettre les commandements divins. Cependant, ils ont succombé à des pratiques qui ne faisaient pas partie de leur culture, en adorant des divinités comme le faisait Pharaon. Il aurait pu réagir de manière bien plus sévère, par exemple demander à Allah de punir son peuple, comme ce fut le cas avec le peuple de Noé ou d’autres peuples punis par Allah . Moussa a simplement réagi de manière humaine.

Moussa et son bâton

De même, lorsque Allah lui a demandé de jeter son bâton, qui s’est transformé en un gros serpent. Allah a également capturé son émotion à ce moment-là. Moussa ressenti de la peur, à tel point qu’il a eu envie de s’enfuir. Il s’est retourné, ne voulant même pas regarder.

Allah rassure souvent Ses prophètes, et cela est particulièrement notable dans le cas de Moussa. Allah lui répète à plusieurs reprises :

« Je suis avec toi, j’entends et je vois ».

Fugitif, recherché, avec une peine de mort contre lui, il retourne vers Allah et demande à ce que son frère, plus éloquent, l’accompagne. Allah accède à sa demande en réponse à son émotion, car il comprend et décrit parfaitement ce qu’il ressent.

Il en va de même pour Ibrahim, où Allah évoque sa douceur et son amour. Allah mentionne les émotions des prophètes lorsqu’ils sont tristes, en colère, ou ont peur.

Notre rôle, en tant que parent

En revanche, que faisons-nous avec nos enfants ? Souvent, nous tentons de minimiser leurs émotions en leur disant « Ce n’est pas grave » ou « Arrête de pleurer ». Souvent, nous essayons de les rassurer en minimisant leurs émotions, sans nous rendre compte que nous ne leur proposons pas de véritables solutions.

Sabrina : Nous avons grandi avec l’idée que les émotions des enfants, comme la colère ou les pleurs, sont associées à un manque d’éducation. Pourtant, les enfants construisent leur éducation émotionnelle à travers nous et ont besoin que nous leur donnions les mots pour exprimer ce qu’ils ressentent. Ils ont besoin de notre accompagnement, surtout entre 0 et 6 ans, lorsqu’ils sont incapables de contrôler leurs émotions en raison de l’immaturité de leur cerveau.

En tant que parents, notre rôle essentiel est :

  • d’accompagner nos enfants,
  • de reconnaître et d’exprimer leurs émotions,
  • de faire preuve d’empathie envers eux,
  • d’être des modèles en exprimant sainement nos propres émotions.

Il est crucial de ne pas réprimer leurs émotions, mais de les reconnaître, de les nommer et de les accompagner avec bienveillance. Lorsque nous sommes en colère, par exemple, nous devons être capables de l’exprimer clairement sans recourir à la violence, aux cris, aux injures ou aux brimades.

Le soutien que nous apportons aux enfants dans la gestion de leurs émotions entre 0 et 6 ans a un impact majeur sur toute leur vie. C’est une période cruciale où ils ont besoin d’un adulte compatissant, empathique et guidant pour les aider à comprendre et à gérer leurs émotions, car ils ne peuvent pas le faire seuls. C’est précisément ce que nous cherchons à faire dans les ateliers :

  • accompagner les enfants dans la gestion de leurs émotions,
  • leur montrer comment réagir face à la colère ou d’autres émotions,
  • les guider vers une éducation émotionnelle saine.
père qui se met au niveau de son fils pour lui parler

L’impact sur le long terme

En offrant cet accompagnement, nous offrons à nos enfants un précieux cadeau qui aura des répercussions positives tout au long de leur vie.

En effet, cela contribue à former un adulte solide, capable de communiquer efficacement, d’exprimer ses pensées et ses émotions. Tu mentionnais précédemment l’importance du cadre familial, qu’il s’agisse du mariage, du remariage, etc. Il est également essentiel d’enseigner à nos enfants les compétences de dialogue et de communication : comment aborder un problème, comment le résoudre en écoutant et en dialoguant.

Tout cela se joue véritablement dès la petite enfance. Il est primordial de s’emparer de cette problématique et d’accompagner nos enfants dans leur développement émotionnel.

Zaynab : Pour cela, une qualité essentielle est nécessaire : l’humilité. En effet, l’ego peut compliquer les choses

Sabrina : Je suis entièrement d’accord avec toi. D’ailleurs, lorsque l’on me demande, en lien avec mon métier, quelle est selon moi la qualité la plus importante d’un enseignant, je réponds : l’humilité, la capacité à se remettre en question en tant qu’enseignant.

À ce sujet, il est important de souligner la responsabilité immense que nous avons envers les enfants en tant qu’enseignants.

Le rôle de l’enseignant

Il y a peu, nous évoquions la responsabilité en tant que parents, celle de prendre soin de cette « amana » qu’on nous confie, mais en tant qu’enseignant, cette responsabilité est multipliée.

En effet, lorsque les parents nous confient un enfant, nous devons veiller à ce que ce que nous lui transmettons soit bienveillant, à éviter de le traumatiser. Lorsque je commence mes ateliers, je pose toujours cette première question aux participants, qu’ils soient enseignants ou parents : avez-vous un exemple d’un enseignant qui vous a marqué dans votre vie ?

Et je peux te dire, Zaynab, que les récits sur les enseignants d’arabe et de Coran sont nombreux, souvent empreints de traumatismes que des adultes portent en eux, parfois depuis des décennies.

C’est pourquoi il est crucial de faire preuve d’humilité en tant qu’enseignant, de reconnaître la grande responsabilité que nous avons envers les enfants qui nous sont confiés. Enseigner l’arabe et le Coran amplifie cette responsabilité. Ce que nous transmettons est d’une importance capitale. Allah a placé cet enfant sur notre chemin avec sa fitra, sa nature innée. Nous ne devons pas la modifier, mais plutôt veiller à ne pas la contrecarrer. Nous devons nous assurer que, lorsqu’il sera plus grand, il se souviendra avec bienveillance de l’enseignant qui lui a apporté son enseignement en arabe dans son enfance.

Zaynab : Pour cela, il faut également se détacher de cette obsession pour la performance. Parce que, comme nous l’avons souligné au début de cet épisode, cela part d’une bonne intention. Je ne pense pas qu’il y ait un parent ou un enseignant qui se dise « je vais le détruire« . Non, cela part d’une bonne intention, mais parfois nous ne savons pas comment bien mettre en place les choses.

Parfois, la bonne intention de certains enseignants est de fournir le maximum de connaissances, d’apprendre beaucoup de choses. Parfois, le focus est porté uniquement sur la performance de l’enfant, il doit apprendre beaucoup de sourates, maîtriser parfaitement la grammaire, etc. Mais s’il se sent en échec, s’il ne comprend pas immédiatement, s’il ne réalise pas les exercices immédiatement, s’il commet des erreurs, en sachant que la réussite appartient à Allah , comment va se sentir cet enfant face à la langue utilisée par Allah pour lui parler ?

Alors où est-ce que se situe la réussite ? Dans son enthousiasme à entendre les sonorités de la langue arabe ou bien dans la note qu’il obtient à un examen de grammaire ?

enseignante musulmane aux côtés de son élève

Rigueur et bienveillance, des notions incompatibles ?

Sabrina : Beaucoup de gens considèrent que la rigueur dans l’apprentissage ne peut pas être compatible avec la bienveillance. Pourtant, beaucoup d’études ont montré qu’un enfant qui se sent bien avec son enseignant, qui a établi une belle relation avec lui, apprend plus facilement.

En effet, cela lui donne envie de performer et d’exceller, cela le motive vraiment, même s’il n’est pas naturellement attiré par la matière enseignée. Le simple fait d’apprécier son enseignant lui donne envie de pousser plus loin ses efforts.

D’ailleurs, cela me rappelle un verset, celui où Allah dit au Prophète ﷺ :

وَلَوْ كُنتَ فَظًّا غَلِيظَ ٱلْقَلْبِ لَٱنفَضُّوا۟ مِنْ حَوْلِكَ

Si tu étais rude, au coeur dur, ils se seraient enfuis de ton entourage.

فَظًّا غَلِيظَ, c’est le summum de la dureté. Allah dit que c’est par miséricorde de Sa part qu’il a été doux envers eux.

En effet, la douceur suscite l’envie, elle attire. Nous devons inspirer nos enfants, leur donner envie, surtout dans une société où ils sont constamment attirés par tant d’autres choses. Il est important de noter que la douceur n’est pas opposée à la rigueur. On peut être rigoureux dans son enseignement tout en transmettant avec douceur ses connaissances.

La douceur est une forme de fermeté. Exactement. En fait, c’est une question d’équilibre. On ne peut pas être constamment dur, tout comme on ne peut pas être constamment doux, cela ne serait pas bénéfique. Il faut trouver le juste milieu. C’est quelque chose que j’essaie de transmettre.

Des émotions saines

Zaynab : Cela nous ramène également au fait qu’il n’y a pas d’émotions bonnes ou mauvaises, comme tu l’as dit. On ne peut pas être tout le temps doux ou tout le temps dur, pour ainsi dire. C’est comme pour les émotions. Prends la colère, par exemple, souvent perçue comme une émotion négative. En réalité, ce n’est pas négatif, c’est une forme d’information, une émotion. Par exemple, lorsque quelqu’un subit une grave injustice, il est attendu de nous que nous ressentions de la colère contre cette injustice afin de réagir. Tu es d’accord ?

Sabrina : Exactement. L’idée principale est de reconnaître que toutes les émotions sont légitimes. Si Allah nous fait ressentir telle ou telle émotion, c’est qu’elle a un rôle à jouer :

  • protéger nos biens,
  • préserver nos familles,
  • favoriser le lien avec autrui,
  • ne pas rester enfermé sur soi-même, etc.

Chaque émotion que Allah nous a donnée nous guide sur quelque chose. Ainsi, toutes les émotions sont légitimes, mais tous les comportements qui en découlent ne le sont pas forcément. C’est là que nous devons intervenir en disant à nos enfants :

Je comprends que tu sois en colère, que tu sois déçu, que tu sois triste.

Mais maintenant, il s’agit d’apprendre à montrer cette colère, cette joie, cette tristesse de manière constructive. Ainsi, nous faisons de nos enfants des individus dotés d’une intelligence émotionnelle forte, sûrs d’eux-mêmes et ayant une bonne estime d’eux-mêmes.

Zaynab : C’est merveilleux, c’est vraiment comme dans le Coran. Allah ne réprime pas les émotions de Ses prophètes, ni des mères et des femmes des prophètes, comme lorsqu’il parle de la mère de Moussa.

La gestion de la colère

Pour en revenir à Moussa, Allah ne lui dit pas de ne pas ressentir de colère. Ce qui importe, c’est ce que Moussa fait après sa colère : il ne se détourne pas de son peuple, ne les abandonne pas. Au contraire, il va :

  • redoubler d’efforts pour eux,
  • continuer de les rappeler à leurs devoirs,
  • leur être reconnaissant,
  • faire preuve de patience, etc.

Les gens ont tendance à dire qu’Allah a dit de ne pas se mettre en colère. Il faut pouvoir comprendre le propos jusqu’au bout. Il faut notamment regarder les explications des savants à ce sujet. Cela ne concerne pas l’émotion en elle-même. En effet, comment peut-on arrêter une colère lorsqu’elle survient ? C’est impossible. On ne peut pas dire « non, non, non, je ne serai pas en colère« . La colère arrive, et elle doit être gérée.

Ce à quoi Allah nous appelle, c’est de faire attention aux conséquences de la colère, de ne pas commettre d’actes regrettables sous l’effet de la colère. C’est pour cela qu’Il conseille aussi quelque chose lorsqu’on ressent de la colère :

  • Si la chose qui te met en colère arrive alors que tu es debout, assieds-toi. Cela réduit l’intensité. Quand on est assis, on est moins enclin à agir violemment.
  • Si la colère arrive alors que tu es assis, allonge-toi. Cela permet de la calmer encore plus.

Ainsi, Allah nous donne des actions à entreprendre, des solutions et des outils pour gérer notre colère. L’émotion devient dangereuse lorsqu’elle est refoulée, réprimée. Allah nous apprend à reconnaître nos émotions et à les traverser.

Si vous voulez un exemple de quelqu’un qui n’a pas su gérer ses émotions, qui les a réprimées et laissées le dominer, vous n’avez pas à chercher loin, commencez par Shaytan. Il s’est laissé consummer par ses émotions et jusqu’à aujourd’hui, il n’a pas su les maîtriser. C’est pourquoi Allah met l’accent sur cela, que ce soit entre nous, avec les autres, ou avec nos enfants, car pour lui, les enfants sont une priorité. Il mise sur la relation conjugale et la relation parent-enfant. C’est sur cela qu’il se concentre, pas nécessairement sur la société dans son ensemble.Il commence par là. Shaytan va vraiment travailler sur notre égo.

Je m’énerve… et mon enfant sourit

Parfois, il nous arrive de mal interpréter les réactions émotionnelles de nos enfants. Comme tu l’as bien rappelé, il ne faut pas attendre d’eux qu’ils soient des experts en gestion émotionnelle entre 0 et 6 ans.

Par exemple, un enfant de 3 ans peut entrer en pleurs lors d’une crise. Typiquement, le parent peut être agacé, voyant l’enfant sourire à ce moment-là. Parfois, on entend même les parents dire

« il se moque de moi », « il est capricieux », « il le fait exprès »

En réalité, l’enfant ne fait pas du tout cela. Quand il sourit dans ces moments-là, c’est une question de neuroscience.

Sabrina : On revient à la science, à la connaissance de l’enfant, à ce qui se passe dans son cerveau. C’est extrêmement important. Ce qui se passe lorsque l’enfant sourit ainsi face à un parent énervé ou à un autre adulte, ce sont les neurones miroirs. Depuis tout petit, il observe que quand il fait des petits sourires, sa maman sourit aussi, ce qui la rend heureuse. Il remarque que lorsque son père rit, cela l’amuse également. Donc, quand tu te mets en colère et que ton enfant te sourit, c’est ce qu’il recherche en fait. Il se dit, je vais sourire pour qu’elle sourit et qu’elle arrête de se mettre en colère. Parce que la colère, c’est ce visage-là, et il veut le changer.

Ainsi, la seule chose qui motive son comportement, c’est sa petite expérience en tant qu’être humain de trois ans qui vient de débarquer sur Terre et qui n’a pas encore assimilé nos codes sociaux. Donc, il va sourire pour te faire sourire. Et cela n’a rien à voir avec un manque de respect.

enfant qui sourit avec la main sur la bouche

Parents, enseignants : la nécessité d’apprendre

Malheureusement, encore une fois, lorsque nous devenons parents, nous ne sommes pas préparés à cela. Personne ne nous enseigne ces choses.

Il n’y a pas d’école de parents. Même pour les enseignants, on ne nous apprend pas à gérer les émotions des enfants, à savoir comment gérer une classe. Imaginez une classe avec 24 petits, chacun avec ses émotions, c’est encore plus complexe en maternelle. Et pourtant, on ne nous apprend pas cela. Donc, on revient vraiment à la base : en apprendre davantage sur l’enfant, son développement, et essayer de l’accompagner de la meilleure des façons possibles.

Je pense qu’il faut également encourager les personnes qui se remettent en question et entreprennent des actions. Il y a quelque chose qui n’est pas facile, parfois, c’est l’entourage proche ou éloigné qui ne comprend pas toujours ce que l’on est en train de mettre en place. Qui n’a jamais entendu ces phrases :

« Ton enfant te mène par le bout du nez »,

« il se moque de toi »,

« tu es trop laxiste », etc.

Par exemple, le simple fait que, en famille ou en public, tu conseilles souvent ton enfant lorsqu’il fait quelque chose de mal, où tu veux le reprendre, est très important.

En fait, on se rend compte que les mêmes règles que l’on applique à un adulte, comme dans l’épisode où je parlais de l’art du conseil, an-nassiha, devraient s’appliquer à nos enfants également. Combien de fois réprimons-nous notre enfant devant tout le monde en public ? Dans ces situations, il y a beaucoup de choses qui se mélangent : le regard des autres, la pression sociale, etc. Nous-même, nous sommes gênés, nous avons l’impression d’être observés. Pendant ce temps, l’enfant est là, ne sachant pas trop comment réagir.

J’ai beaucoup aimé quand tu as dit qu’il y a un moyen simple de régler cela, pour faire baisser la pression : prendre l’enfant à part et de s’isoler avec lui. Pas pour le punir, je tiens à préciser. Avant tout, il faut accueillir ses émotions. En fait, nous remarquons que chaque enfant est différent. Et nous devons commencer par prendre soin de nous-mêmes. Le travail commence par nous-même en premier. C’est ce qu’il y a de plus difficile, c’est cela le plus difficile. Nous voulons agir sur nos enfants, mais en réalité, la réforme doit venir de nous-même.

Se réformer avant d’influencer

Sabrina : Effectivement, Allah ﷻ nous enseigne dans le Coran qu’il ne change pas l’état d’un peuple sans que ce peuple ne change ce qu’il y a en lui-même. Cela signifie que si tu veux influencer l’éducation de tes enfants, si tu veux vraiment avoir un impact sur eux, tu dois d’abord commencer par te changer toi-même, par t’éduquer toi-même. En fin de compte, c’est à toi-même que tu dois servir en premier lieu, puisque tu es le chef de famille, responsable de ta femme et de tes enfants. Comment pourrais-tu leur être utile si tu ne sais pas où tu en es toi-même ?

Zaynab : Concernant la parentalité pendant le Ramadan, nous devrions d’abord comprendre que le travail ne consiste pas seulement à agir sur nos enfants, mais d’abord sur nous-mêmes. Ce qui est beau avec les enfants, c’est qu’ils sont souvent de grands pardonneurs. Lorsqu’ils voient leurs parents remettre en question leurs méthodes d’éducation, beaucoup de parents ont peur du regard de leurs enfants. Ils craignent que leurs enfants ne les acceptent pas, ne se moquent d’eux ou leur en veuillent. Mais tu sais, comme certains adultes, quand tu essaies de rectifier quelque chose que tu as fait de mal, il est difficile de trouver le pardon lorsque l’on grandit.

Les enfants et le pardon

Souvent, dans les relations humaines, on peut observer que lorsqu’une personne demande pardon, l’autre peut réagir en disant : « Oui, mais tu m’as fait ça », ou en exprimant d’autres reproches. Parfois, la personne qui a demandé pardon peut même regretter d’avoir fait cette démarche.

Certains parents pensent de la même manière vis-à-vis de leurs enfants ! Pourtant, les enfants ne réagissent pas du tout ainsi. Pour eux, il n’y a rien de plus beau que de voir leurs parents :

  • admettre leurs erreurs,
  • les rectifier
  • s’excuser sans gêne.

Sabrina : Vous serez agréablement surpris de voir à quel point les enfants sont de grands pardonneurs. C’est pourquoi il est important de se mettre à la place de l’enfant. Retirez votre casquette de parent et revêtez celle de l’enfant vis-à-vis de vos propres parents, s’ils sont encore en vie ou non.

Si vous avez vécu des situations négatives avec vos parents, qu’attendez-vous en tant qu’adulte ? Si demain ils venaient vous demander pardon, vous seriez la personne la plus heureuse du monde et vous leur pardonneriez. Il est donc important de changer de perspective, car cela nous permet de voir les choses différemment et peut nous aider à surmonter la peur d’être jugé par nos enfants.

Se prioriser pour mieux agir avec les autres

Zaynab : Je pense que dans cette préparation pour le Ramadan, il est important de réapprendre à reconnaître ses propres émotions. Lorsque vous êtes confronté à une situation, que ce soit avec votre enfant ou non, essayez d’identifier ce que vous ressentez. Que cela soit de la colère, de la tristesse, ou du sentiment d’être dépassé, essayez de comprendre ce que cela réveille en vous. Parce que l’émotion est une information, et même une indication d’Allah ﷻ. Et Allah ﷻ ne nous offre que des cadeaux.

Effectivement, lorsque nous traversons ces émotions, c’est comme si Allah ﷻ nous tirait des petites sonnettes d’alarme, nous indiquant qu’il y a quelque chose à régler en nous. Plutôt que de réagir de manière défensive ou en s’énervant, nous devrions nous demander ce que cette émotion essaie de nous dire. Souvent, la colère cache une peur ou une tristesse.

Certaines personnes, lorsqu’elles sont tristes ou ont peur, réagissent en attaquant avec la colère. Il est donc essentiel de se demander ce que cela signifie pour nous, et même si cela peut nous amener loin, nous devons le faire pour notre bien-être, pour notre propre Paradis que nous aspirons à atteindre, et pour le bien de nos enfants, de notre descendance. Écouter nos émotions et examiner comment nous nous traitons est également crucial, tout comme cela peut affecter notre relation avec nos parents.

Il est nécessaire de renouer avec notre cœur, avec nos intentions. C’est pourquoi, avant d’aborder cela, il est important de :

  • se préparer mentalement et physiquement,
  • d’aborder les pensées intrusives,
  • clarifier nos intentions,
  • pratiquer les invocations,
  • reconnaître nos propres jugements envers les émotions des autres tout en négligeant les nôtres.

Nous ne pouvons pas progresser si nous passons notre temps à juger les autres sans réfléchir à nos propres émotions et comportements. Cette habitude se transmet de génération en génération, et beaucoup de gens passent une grande partie de leur vie à reconstruire leur estime de soi et leur confiance en eux-mêmes. Nous devons réaliser qu’il y a un temps pour tout, et parfois, nous devons rattraper ce que nous aurions dû apprendre et comprendre plus tôt dans la vie.

Donc durant ce Ramadan-là, il faut se remettre en question par rapport à ça.

Ramadan et parentalité : comment gérer en tant que maman ?

Beaucoup de mamans disent se sentir diminuées parce qu’elles ne peuvent pas faire autant de choses qu’elles voudraient. Elles s’imposent des choses incommensurables. Et finalement, ça va projeter au long terme “la faute”, “la colère” sur l’enfant, comme s’il l’empêchait de faire tous ces actes d’adoration, etc.

Pourtant, ce qu’on oublie, c’est que l’adoration, elle est peut-être devant nous. Alors qu’est-ce qu’on en fait ? Qu’est-ce qu’on fait de cette amana? Il faut se dire que l’on a suffisament de valeur auprès de Lui pour qu’Il nous en confie la charge.

Sabrina : Effectivement, quand le Ramadan approche, il y a beaucoup de culpabilité qui s’installe. Les mamans ressentent de la frustration car elles ne peuvent plus prier autant qu’elles le voudraient. Parfois elles ne peuvent pas aller au Tarawih. Elles passent davantage de temps en cuisine ou à s’occuper du foyer, des enfants, etc. Si on ne prend pas soin de ces émotions quand elles nous traversent,ça peut se transformer en une espèce de colère, quelque chose de néfaste. Si on ne l’exprime pas clairement, malheureusement parfois, ça peut se traduire sur l’enfant. On va se mettre en colère contre lui, etc.

J’aimerais lancer un message à toutes les mamans bienveillantes qui nous suivent et qui nous écoutent :

Soit bienveillante envers toi en premier lieu. Si tu veux être bienveillante avec ton enfant, accorde-toi cette bienveillance envers toi-même, ainsi que de la Rahma, tout comme ton Seigneur à de la Rahma envers toi.

L’adoration est sous tes yeux. Donne beaucoup de soin à son éducation. Essaye de renouer avec lui, d’être à son écoute, d’écouter ses émotions. Essaye de voir ce que tu peux mettre en place avec cet enfant pour créer un meilleur climat familial.

Quand tu fais ça, c’est une adoration en soi-même.

La culpabilité parentale

On pourrait parler de culpabilité parentale, car c’est quelque chose de très intense. Nous, les mères, nous nous sentons coupables pour tout et pour rien. D’un côté, il y a ceux qui disent qu’il ne faut pas culpabiliser les mères. La culpabilité n’est pas bénéfique, mais d’un autre côté, il y a ceux qui se flagellent eux-mêmes. Je sais, je suis passée par là, donc je sais de quoi je parle. Pour moi, il est vraiment important de trouver un juste équilibre. Comme tu l’as mentionné précédemment, chaque émotion, même si elle nous fait ressentir de la culpabilité, nous renseigne sur nous-mêmes.

Donc pour moi, il y a deux types de culpabilité.

La culpabilité malsaine

  • Elle te pousse à remettre constamment en question tout ce que tu fais.
  • Tu te flagelles mentalement,
  • Tu te parles mal à toi-même,
  • Tu vas avoir beaucoup de waswas
  • Tu t’envoies des messages négatifs,
  • Tu ressens beaucoup de stress et d’anxiété.
  • Cette culpabilité te freine, t’empêche d’agir, te bloque.

Pendant ce ramadan, nous devrions essayer de nous en débarrasser.

La culpabilité saine

  • Ressentir un profond regret pour l’erreur commise
  • Ne plus vouloir y retourner

C’est une condition essentielle du repentir. Si nous n’avions pas de culpabilité, quand est-ce que nous nous repentirions ?

L’importance de l’humilité

Peut-être que je réalise que je m’exprime uniquement en criant sur mon enfant. Je prends conscience que pendant les rares moments que je passe avec mon enfant dans la journée, ce ne sont que des ordres, des consignes, des exigences :

  • Qu’as-tu fait ?
  • Qu’as-tu oublié de faire ?
  • As-tu bien écouté ?
  • Dépêche-toi !

Ce sont toutes des questions liées à la scolarité et à la productivité.

Et là, je prends du recul. Même si j’ai parfois réagi avec colère envers mon enfant, je l’ai frappé, j’ai été injuste envers lui. Mais maintenant, il y a cette culpabilité saine qui me pousse à prendre du recul et à reconnaître que ce comportement n’est pas approprié. Je comprends que ce que j’ai fait n’était pas bon. Pour cela, je dois faire preuve d’humilité, prendre du recul et analyser ma propre réaction. Qu’est-ce qui a déclenché cela en moi ?

  • Est-ce parce que je n’ai pas beaucoup dormi ?
  • Est-ce parce que je me sentais jugée sous le regard de quelqu’un ?
  • Était-ce à cause de ma colère envers mon mari ?
  • Ai-je donc projeté cela sur mon enfant ?
  • Étais-je frustrée ?
  • Ce soir-là, je voulais vraiment assister à un événement et mon enfant n’arrêtait pas de pleurer. Je n’ai pas su gérer.

J’analyse en profondeur ce qui a déclenché cette colère et je travaille sur les causes. Je travaille sur les causes pour ne plus faire subir cela à mon enfant, à cette amana qui m’a été confiée, qui est en plein développement et qui se forme à travers mon regard.

Le mimétisme des enfants

Le enfants se construisent à travers notre comportement. Ils reproduisent beaucoup plus ce que nous faisons que ce que nous leur disons de faire. Je crois qu’ils n’écoutent que 1% de ce que nous leur disons.

En revanche, ils enregistrent et reproduisent tout le reste :

  • nos mimiques,
  • nos gestes,
  • nos réactions.

Zaynab : Cela me fait penser à une question que tu aimes poser aux adultes pour qu’ils la posent à leurs enfants :

Quelle est la phrase que maman ou papa répète le plus souvent ?

Sabrina : Généralement, nous entendons des phrases auxquelles nous n’aurions pas pensé. Nous nous attendons à des expressions comme :

« Je t’aime »

« Viens, on va déjeuner »

« Regarde le bon plat que je t’ai préparé »

Mais parfois, nous sommes surpris. On rencontre plutôt des phrases comme :

« As-tu fini tes devoirs ? »
« Je suis énervé »
« Je veux que ta chambre soit nickel »
« Où vas-tu faire tes ablutions ? »
« As-tu prié ? As-tu prié ? As-tu prié ? »

Ce sont celles qui ressortent le plus souvent. C’est un exercice assez intéressant pour nous remettre en question.

Zaynab : Imaginez que cette phrase que votre enfant entend le plus souvent, vous deviez l’encadrer sur un mur. Si elle devait être la citation du jour que vous mettez à l’entrée de votre maison ou dans le salon. Seriez-vous fière de cette phrase ? Ainsi, créons chez l’enfant ce que nous voulons qu’il retienne.

En tant qu’adulte, il y a encore des phrases que nous entendons ou des réflexions que nous avons. Ce n’est pas notre propre voix que nous entendons lorsque nous réfléchissons, mais parfois celle de notre mère pour un sujet spécifique, ou celle de notre père pour un autre sujet, voire celle d’un enseignant.

Sabrina : Tu sais, c’est intéressant ce que tu dis parce que récemment, je m’intéresse beaucoup à tout ce qui concerne le bilinguisme, et j’ai lu quelque chose qui m’a interpellé. Je ne sais pas si tu as déjà vécu cela, mais lorsque nous crions sur nos enfants, souvent nous le faisons dans notre langue maternelle.

Alors pour moi, c’est le kabyle. Au début je me demandais pourquoi j’utilisais le kabyle quand je m’énerve. En fait, c’est la voix que les parents ont eue !

Se faire accompagner pour renouveler sa parentalité

Pour soi-même

Ainsi, durant ce mois, on va essayer de se remettre en question. Si j’ai vécu des traumatismes dans mon enfance ou si j’ai eu une relation compliquée avec mes parents, je ne veux pas transmettre ce fardeau à mon enfant. Ainsi, il n’y a rien de mal à être suivi par un spécialiste, à aller voir un psy, pour travailler sur ces traumatismes et les extérioriser.

Cela ne signifie pas qu’il faut aller voir ses parents et leur dire tout ce qui s’est passé. En fait, le simple fait que ces émotions sortent et de travailler dessus, de s’en rendre compte, c’est déjà un grand pas.

Dans la relation avec l’enfant

Si je n’ai pas les outils nécessaires pour que mes enfants m’écoutent et que je mette en place des règles, je décide de me faire accompagner.

Si je réalise que je ne prends pas assez de temps pour moi et que cela affecte ma capacité à m’occuper des autres, je décide de prendre soin de moi. Chacun doit faire son examen de conscience par rapport à son rôle d’éducateur.

Zaynab : On insiste beaucoup sur le fait de ne pas se laisser paralyser par la culpabilité, les émotions, etc. Souvent, elle nous paralyse parce qu’on la tait, on ne veut pas l’exprimer, mais elle doit s’exprimer.

Reconnaitre ses erreurs auprès de son enfant

Je pense qu’une nouvelle approche que nous pouvons adopter, c’est de l’exprimer, pour nous-mêmes, mais aussi pour l’enfant. Il n’y a pas de mal à reconnaître si l’on a élevé le ton, si l’on a crié, si l’on s’est fâché, même si on le dit à l’enfant en fin de journée. On peut lui expliquer :

“Ce matin, je t’ai trop souvent dit de te dépêcher. Avec du recul, je réalise que ce n’était pas marrant pour toi. Ce n’est pas ce que je voulais. Pardonne-moi sur ce point. Je ne voulais pas te crier dessus. J’étais en train de penser à autre chose, j’ai reçu une mauvaise nouvelle, etc. Et à ce moment-là, il fallait faire cela, ou bien tu m’as dit cela, etc. J’avais tellement de choses en tête que cela a dépassé ma réaction, mais ce n’était pas dirigé contre toi. Je ne voulais pas que ça se passe comme ça.”

Expliquer permet à l’enfant de comprendre que ce n’est pas dirigé contre lui. Il pourra lui aussi, peu à peu, expliquer aux parents ses réactions.

Parfois, l’enfant agit de manière qui peut énerver les parents, sans se douter que ces derniers pensent qu’il le fait exprès pour les énerver. Si on lui demandait, il dirait que ça n’a rien à voir avec ses parents. Pour lui, c’était juste qu’il n’a pas eu son jouet, il était frustré, c’est tout. Ce n’était pas dirigé contre toi.

Mais si nous ne lui enseignons pas que ce n’est pas dirigé contre lui en grandissant, il comprend le contraire. L’enfant n’apprend plus à faire face à ses émotions.

Le Coran en soutien à la parentalité

Pour en revenir à nos ayat du jour, on a vu que l’on a une obligation de moyens, par les causes, les invocations, et après c’est Allah qui guide.

C’est Lui qui choisit, et nous nous remettons totalement à Lui. Nous avons cette magnifique invocation dans cette ayah. Il ne faut pas hésiter à la répéter beaucoup. C’est une invocation phare pour la famille.

Il faut aussi prémunir de ce qui nous entoure, réciter beaucoup de Coran à la maison, notamment la sourate Al Baqara, on ne le répète jamais assez.

Zaynab : En plus avec le Ramadan, vous entrez dans le mois du Coran. C’est l’occasion, tout est décuplé. C’est le plus beau cadeau que nous puissions faire à nos enfants. Dans le Coran, nous voyons beaucoup de versets où les parents prient pour leurs enfants.

Si vous en voulez un exemple, vous pouvez consulter la sourate Ibrahim, la quatrième page, c’est toute une page où Ibrahim, que la paix soit sur lui, prie pour les musulmans, pour sa descendance.

Je me dis que si je ne fais pas de dou’a pour mes enfants, qui le fera ? Et rappelez-vous que les invocations, c’est “comme une flèche que vous tirez et qui atteint toujours sa cible.”

Parmi les conditions d’exaucement des invocations, il y a

  • le fait de les faire sous la pluie,
  • pour le voyageur,
  • le jeûneur,
  • la femme enceinte
  • celle qui accouche.

Mais il y a aussi l’invocation du parent pour son enfant !

Donc, tu imagines, c’est ton enfant. C’est un être dont tu as la charge, un serviteur d’Allah ﷻ qui t’a été confié. Donc, il ne t’appartient pas. Tu dois donc en prendre le plus grand soin. Tu demandes quand même du renfort à Allah ﷻ, car même s’Il t’a confié cette mission, Il ne t’a pas dit que tu ne pouvais plus Lui demander de conseils ou de l’aide.

Donc, tu te tournes vers Lui, c’est comme un joker en fait. C’est un joker que tu utilises et l’invocation, elle va toujours recalibrer le destin pour lequel tu as demandé.

Et en fait, tu demandes à Allah ﷻ de t’aider dans cette mission. Et ça rentre aussi dans ton commerce avec Allah ﷻ !

Elever nos enfants dans notre commerce avec Allah ﷻ

Alors qu’est-ce que ça signifie ? Tout simplement, c’est élever des enfants qui se comporteront comme des futurs habitants du Paradis.

D’ailleurs, peut-être que notre clé du paradis est en fait dans nos enfants. Combien de hadiths parlent de cela ? Par exemple, celui qui me vient à l’esprit concerne un homme qui éduque correctement trois filles. Il est dit que cela constituera un voile entre lui et l’enfer. En élevant correctement ces filles, en les guidant vers la bonté, il crée en fait une barrière entre lui et l’enfer.

Tout cela grâce à ses enfants. Donc, tes enfants, que tu peux parfois voir comme un fardeau ou une source d’émotions compliquées, pourraient en fait être ta clé du paradis. Cela change notre perspective ! Nous prenons soin du dépôt d’Allah ﷻ, nous prenons soin des serviteurs d’Allah ﷻ. Personnellement, je vois souvent mes enfants de cette manière. Je me dis qu’Allah ﷻ me les a confiés.

Islam et châtiments corporels, est-ce compatible ?

Si l’on pense aux châtiments corporels, on peut se demander :

  • Ai-je la permission d’Allah ﷻ de lever la main sur mon enfant, sur Son serviteur ?
  • Est-ce qu’Il me l’a autorisé ?
  • Est-ce que cela fait partie des règles qu’Il m’a fixées ?

Non. D’ailleurs, dans certains hadiths au sujet des enfants qui atteignent l’âge de 10 ans, le terme employé ضرب est souvent traduit par «il faut le frapper », mais il faut partir de la langue qu’Allah ﷻ a choisie et ne pas se baser sur une traduction, qui peut être trompeuse.

Allah ﷻ utilise ce verbe dans le Coran pour dire qu’Il a donné un exemple. Il ne s’agit pas de dire qu’Allah ﷻ nous a frappés, qu’Il nous a giflés avec un exemple ! Il évoque le fait que lorsqu’une personne est confrontée à une autre, cela peut aussi signifier une confrontation physique, d’accord ? Si cela se produit pendant la guerre, c’est le cas. Mais Il parle de créer une réaction, un électrochoc chez cette personne. Dans un couple, Il le dit quand une femme dépasse les limites avec son époux et Il lui fixe des limites à respecter.

D’abord, il la conseille, ensuite il peut boycotter la couche conjugale. Et après, il y a le fameux verbe « ضرب » qui vient. Beaucoup de personnes le traduisent par « il faut la frapper ». Non, cela signifie plutôt qu’elle doit prendre conscience de ses actions. Elle doit se rendre compte de ce qu’elle est en train de faire. Lorsqu’on en parle, ce n’est pas une simple dispute dont il s’agit. Il est dit « نُشُوزَ », ce que les savants traduisent vraiment comme étant une situation d’hystérie où elle a dépassé toutes les limites humaines de respect entre deux personnes.

Allah ﷻ ne dit pas de frapper, mais il dit qu’elle doit comprendre. Un électrochoc, parfois, peut être nécessaire, surtout pour ceux qui sont très tactiles. Le simple fait de saisir quelqu’un, de le regarder droit dans les yeux et de lui dire « ça suffit, là c’est trop ». Personnellement, cela aurait un grand effet sur moi. La personne me montre physiquement que c’est trop.

C’est pareil avec l’enfant.

Que faire avec un enfant de 10 ans qui refuse de prier ?

Sabrina : Si ton enfant atteint l’âge de 10 ans et qu’il refuse de prier, il faut peut-être se poser de bonnes questions. L’apprentissage de la prière ne devrait pas attendre 10 ans. Cela commence dès son plus jeune âge, en le familiarisant avec l’adhan. Quand on prie, on le garde près de nous.

Le Prophète ne repoussait pas les enfants pendant la prière. Il a même permis à son petit-fils de jouer sur ses épaules alors qu’il priait. Il a prolongé sa prosternation pour ne pas interrompre son jeu.

Nous avons des références contemporaines sur ce sujet. Il existe de nombreux livres très bien faits à ce sujet. Je pense notamment à la sœur Safiya de Douceur et Lumière (@douceur_et_lumiere sur Instagram) qui fait un travail immense pour montrer aux enfants par la douceur. Personnellement, quand je regarde ses vidéos, je suis émerveillée !

Si l’enfant est motivé, il aura naturellement envie de prier. La prière deviendra quelque chose de noble, de doux, de bénéfique, de réconfortant. Il ne refusera pas de prier à l’âge de 10 ans. De 0 à 6 ans, tout se construit. N’attendez pas que vos enfants soient plus âgés, commencez dès maintenant, dès leur plus jeune âge. En effet, à l’adolescence, les enfants remettent en question tout ce qu’on leur a enseigné pour se le réapproprier !

C’est pourquoi il est crucial de leur transmettre beaucoup de choses avant l’adolescence. Ainsi, lorsqu’ils déconstruiront, ils pourront se réapproprier leur propre façon de gérer leur relation avec Allah ﷻ, car elle est personnelle.

Entre eux et Allah ﷻ, il n’y a pas de tiers. Donc vraiment, si l’on envisage de frapper un enfant lorsqu’il atteindra 10 ans pour le forcer à prier, peut-être devrions-nous réfléchir à cela dès maintenant.

Zaynab : Faisons preuve de Rahma, de compassion, en ce moment. C’est quelque chose que je répète souvent ces derniers temps : Rahma, Rahma, Rahma, beaucoup de compassion.

Comme l’a fait le Prophète , lorsqu’il a pris son petit-fils sur ses genoux et qu’un homme à côté de lui, étonné, a dit :

« Moi, j’ai dix enfants et je n’en ai jamais pris un sur mes genoux. »

Et que lui a répondu le Prophète ?

« Que puis-je faire pour toi, si tu as été privé de rahma? »

En effet, que peut-on faire si la compassion t’a quittée ?

Accueillir les émotions de son enfant

Regarde comment Ya’qub عليه السلام, le père de Youssouf عليه السلام, l’a accueilli.

La première scène que nous avons dans l’histoire de Youssouf عليه السلام, comment apprenons-nous à le connaître ? Si nous ne le connaissions pas et que nous voulions simplement le connaître à travers le Coran, c’est à travers sa conversation avec son père. Et la manière dont il a pu avoir suffisamment confiance en son père pour lui expliquer quelque chose qui lui a fait peur, un rêve. Et comment Ya’qub عليه السلام a accueilli son rêve.

Regarde comment Luqman عليه السلام, qui était un homme sagr, parle à son fils, dans la sourate qui lui est dédiée.

Vois comment Ibrahim عليه السلام aussi, quand il parle à son fils Isma’il et lui annonce qu’il s’est vu en rêve en train de l’égorger. Qu’est-ce que tu en penses ? Et regardez ce qu’ il lui répond. Je vous laisse la curiosité d’aller regarder.

Toutes ces choses qui nous sont offertes par Allah ﷻ sont vraiment un cadeau. Il aurait pu choisir plein d’autres scènes dans le Coran, mais il a choisi celles-là. Il faut méditer là-dessus et demander à Allah ﷻ de faire en sorte que ce Ramadan soit meilleur et qu’il soit un tremplin pour :

  • le reste de l’année,
  • le reste de notre vie,
  • nous et notre descendance,
  • la communauté.

Un mot pour la fin ?

Sabrina : Pour les personnes qui se disent qu’elles ont mal fait avec leur enfant, sachez qu’il n’est jamais trop tard. Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir, n’est-ce pas ?

Tant qu’on est en vie, on peut se repentir. Le tawbah nous est accordé tout au long de notre vie. Allah ﷻ n’attend qu’une chose de nous quand on commet des erreurs, c’est qu’on se repente. Donc il n’est jamais trop tard. Les conseils que je peux vous donner :

  1. Faites-vous accompagner si vous avez besoin d’aide.
  2. Invoquez Allah ﷻ. Je le répète encore une fois, on a une obligation de moyens, mais pas de résultats. C’est seulement par la Rahma d’Allah ﷻ qu’on obtient ce que l’on obtient.

Nous espérons que cet épisode sur le fait de renouveler sa parentalité t’a plu. On remercie Allah ﷻ et nous Lui demandons plus de personnes dans la communauté à semer ces graines, plus de parents qui se remettent en question, nous y compris, et de nous guider vers la communauté du Prophète . Nous voulons qu’il soit fier de nous lors du Jugement dernier. Il aura de quoi être fier parce que nous aurons été à la hauteur. Si la thématique de la famille t’intéresse, n’hésite pas à consulter les autres épisodes !

illustration pour une épingle Pinterest avec pour titre : "renouveler sa parentalité : une nécessité"
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